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La frustration dans le trading

Par Christophe Gautheron

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Tous ceux qui pratiquent l’investissement en bourse, ont noté la difficulté à rentrer correctement en position sur une valeur. Pour le trader professionnel, tout autant que pour l’amateur, il est toujours trop tôt, ou alors trop tard, soit pour acheter, soit pour vendre. Et, chaque transaction une fois disséquée, qu’elle fusse gagnante ou perdante, laisse en bouche un goût pâteux d’incomplétude doublé d’une sauvage insatisfaction.

Une des figures mythique de la spéculation boursière Américaine confiait elle-même, en bout de course d’une existence trépidante, que : « Dans une vie, l’on achète une seule fois au plus bas, et l’on vend une seule fois au plus haut ... et pas sur la même valeur ».

Un autre Mandarin de l’investissement à Wall Street confiait, il y a quelques années : « Sur les marchés, quasiment chaque jour depuis 30 ans, je suis passé à côté de l’affaire de ma vie !». Bref, même pour les plus brillants, les plus capitalisés, et les plus avertis, une opération boursière optimale n’est qu’un mythe auquel il est vain de se rattacher.

Pour la plupart des gens, la distorsion qui apparaît entre « l’idéal envisagé » et le « vécu bancal » laisse de profondes cicatrices qui gravent dans nos chairs leur nom : FRUSTRATIONS.

Certains diront que les grands regrets sont les géniteurs désignés d’œuvres formidables et surprenantes, comme par exemple l’ouvrage « Sur les traces de Dracula » qui émergea, on le sait, des frustrations de l’écrivain Aristocrate Bram Stocker. Fort vrai ... pour le domaine de la création artistique, mais en terme de finance boursière, mon expérience me dicte d’affirmer doctement que la frustration est tout, sauf un avantage stratégique gagnant. Cela provient de l’essence même de la frustration : elle est par construction orientée vers un passé révolu, irréversible, et vain.

D’ailleurs, la communauté des psychologues semble s’accorder pour dire que la frustration méne à des comportements déviants car elle anéantit la capacité de réflexion et de concentration.

Le marché financier est décrit par de nombreux scrutateurs scientifiques comme le lieu parfait du chaos déterministe. C'est-à-dire l’endroit d’un brouhaha perpétuel en lequel les pistes à court terme sont brouillées (« on ne peut rien y faire » dit-on !), mais en lequel malgré tout des tendances significatives apparaissent avec le recul du temps (« Il fut possible d’y faire » dit-on !).

Comme le chantait Sting dans une de ses chansons mythique ; Russians : « I don’t subscribe to this point of view » ...mais ce sera l’objet d’un autre chapitre.

Et, face à la confusion issue de signaux financiers pris de délires, il semble courant que de nombreux intervenants en bourse restent pétrifiés des mois, voire des années dans l’attente de comprendre, et de trouver du sens aux arabesques de leurs valeurs chéries. Tout semble montrer que c’est là un mystère sans espoir de révélation.

En fait, il semble bien que la bourse soit un jeu très semblable au golf, un sport dont Churchill disait : « Seul le golfeur sait la frustration d’un sport qui consiste à envoyer une balle incontrôlable vers un trou inaccessible à l’aide d’instruments inadaptés ». Et bien, la bourse laisse la plupart des individus dans le même sentiment de perplexité.

Le coupable de cette émotion qui paralyse presque TOUS les traders se trouve au cœur de nos cerveaux dans une zone très précise, le cortexorbitofrontal : un amas assez gigantesque de cellules dédiées à la décision, et qui est situé à la hauteur du front sur la partie gauche du visage pour la partie qui nous intéresse.

Grâce aux progrès techniques des systèmes d’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM), il est possible depuis environ 15 ans de voir le cerveau humain fonctionner tandis qu’il effectue son travail. L’IRM a permis des progrès importants dans l'étude des bases neurobiologiques de la pensée. Notamment, cette technologie a permis de découvrir qu’en matière d’investissement, le cortexorbitofrontal réagit, non seulement à ce qui est, mais aussi de manière plus étrange, il tend à s’enflammer, à postériori, pour ce qui aurait pu être.

De là, naît le sentiment de ce que l’on nomme dans les corps d’armée : « le psychotage » ; c'est-à-dire que le cerveau concentre une énergie considérable, obsessionnelle et vaine, à examiner sous toutes les coutures des scénariis alternatifs à ce qui s’est passé. De nombreux regrets et des frustrations jaillissent à l’envie de ce mode de fonctionnement qui s’exprime comme de la lave qui bouillonne puis jaillit avec violence du cratère du volcan.

Sachez que, plus le cortexorbitofrontal est actif, plus les gens regrettent les choix ... QU’ILS N’ONT PAS FAITS. (Petit aparté : cette partie du cerveau est aussi celle réservée au langage, ainsi qu’aux fonctions cérébrales supérieures ... c’est là le creuset de ce que le grand public nomme l’intelligence fluide)

Plus étonnant encore, et, on trouve en ce point l’explication de la procrastination, terme que je vous expliquerai plus loin : les IRM nous indiquent que la perte évitée, donc conséquence de l’inactivité, crée un embrasement cérébral presque deux fois supérieur à celui issu d’un gain direct.

Bref, contre toute attente, il semblerait que nos logiciels internes nous poussent à nous satisfaire de l’INACTION. Sur le plan évolutionniste, il est probable que la témérité ne soit concentrée que sur une petite quantité d’individus.

Ceux-ci explorent de nouvelles voies. S’ils succombent, alors il n’y a pas d’impact sur l’ensemble du groupe qui reste statique. S’ils réussissent, alors le groupe adopte le même chemin... une fois la garantie d’amélioration des conditions de vie du collectif fourni par le téméraire.

Ainsi, amis trader, vous venez de comprendre que seule une petite fange de la population est programmée par Dame nature pour affronter le marché, car éviter les pertes ... ne rien faire... c’est rester en vie ... et c’est le choix fait par défaut pour tout un chacun.

En règle général, l’être humain est configuré comme Oblomov. Oblomov est une œuvre reconnue d’Ivan Gontcharov, un des maîtres de la littérature Russe. Oblomov représente dans l’inconscient collectif le prototype de l'homme qui sacrifie par frustration ses rêves à une léthargie, qu'il vit pourtant comme un drame. Ce héros semble incapable de prendre des décisions ou d’effectuer la moindre action importante alors qu’il en créve d’envie.

Je sais que de nombreux intervenants en bourse se projetteront aisément en jumeaux astraux d’Oblomov, et ils comprendront à la lecture de l’ouvrage, la nature perverse du mal qui les affecte et que l’on nomme en psychologie : la procrastination.

Intuitivement, ou par expérience, certains opérateurs en bourse ont noté cette difficulté à agir consciemment, avec vigueur, et au jour le jour, sur les marchés financiers. Ils proposent donc des systèmes automatisés qui permettent de s’affranchir des émotions dans le trading.

Un poncif de la bourse dit : « Le maillon faible du trading : c’est vous ! » ; c’est beau, profond, et pour une fois la discussion de bistro délivre un message vrai : la logique du vivant est là pour en attester !

Il y a toujours des individus que le hasard isole, et que la génétique favorise : je vous souhaite d’être l’élu de la finance ... le cas échéant , il faudra travailler beaucoup, et sculpter un matériau très malaisé : vos émotions !

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