Il existe une certaine hypocrisie actuellement en France quand on parle de
l'avenir de l'immobilier et de ses prix de transactions. Certes, il faut rester
précautionneux dans la mesure où l'on parle de futur. La part de hasard tient
toujours une place de choix dans le résultat final.
Il n'empêche qu'en consultant les données sur un siècle, voire un siècle et demi
pour les prix à Paris ou aux USA, on parvient à une conclusion sous forme de
deux scénarios.
L'immobilier ne remontera JAMAIS et reprendra une progression égale à celle en vigueur depuis un siècle hors période de guerre, soit environ 1% + inflation chaque année. Auquel cas, tout le monde se voile la face actuellement et la déconvenue au cours de la deuxième décennie qui vient, va être monumentale. Une génération entière se sera endettée pour acheter du vent, une valeur d'actifs immobilier qui ne correspondait à rien. Ce scénario est celui auquel je crois le plus.
Le graphique ci-dessous des prix immobiliers américains, en avance d'environ 18 mois sur la France montre à quel point, le délire a été fou. Il rappelle celui de la bulle internet en 1999. Avec 9 années de recul, le résultat final est maintenant connu...
Les Etats Occidentaux perdent le contrôle monétaire de la situation, ce qui débouche sur une nouvelle période d'hyper inflation. Auquel cas, des bulles matières premières et pourquoi pas immobilières se remettent en place. Tout le monde sauve sa peau. A horizon deux ans, je n'y crois pas pour au moins deux raisons. La première est que les bulles se sont faites dans le cadre d'un ping pong géant mondialisé entre des autorités monétaires laxistes et une démographie post baby boomer adaptée. On le voit actuellement, si personne n'est là pour emprunter, aucune bulle n'est rendue possible quand bien même les autorités monétaires créent des conditions favorables. Or, les baby boomers partent massivement à la retraite. Les tensions sur la demande ne seront pas reproductibles à l'avenir, juste celles issues de la spéculation, qui ne feront pas le poids. Deuxième raison, les marchés financiers accusés de tous les maux, à tort, tout comme l'euro l'a été en son temps avant qu'on découvre qu'il protégeait diablement bien tout de même... mettront théoriquement un gros STOP à la folie monétaire des gouvernements. Quand la communauté financière internationale estimera à une majorité que les Etats sont trop endettés et qu'il est donc devenu trop dangereux de prêter son argent à ces agents économiques, les taux long terme remonteront et le robinet se fermera naturellement, empêchant ainsi la poursuite de la fuite en avant...
Vous l'aurez compris. Je suis baissier à long terme sur l'immobilier. Il n'y aura pas à mon sens de rebond, ni de redémarrage, mais un retour à une moyenne historique.
Dans le cadre des chroniques sur Abcbourse, j'ai demandé à différents analystes de nous faire du reporting terrain sur des destinations cosmopolites comme Phuket en Thaïlande, la Crête et Chypre en Europe.
Vous trouverez ci dessous un papier de Julien Mayard, installé depuis huit ans à Phuket qu'il a rédigé spécialement pour Abcbourse.
Julien Mayard
Depuis l'éclatement de la bulle des sub-primes, les autorités nous ressassent que la Thaïlande, dont plus 70% du P.I.B. est constitué par l'export et le tourisme, est "immunisée" contre la crise. Or, les prix baissent enfin à Phuket.
Même si, officiellement, les prix augmentent toujours; en fait, tout est négociable et certains propriétaires ont déjà diminué leurs prétentions jusqu'à 80% !
Par exemple, cette maison, située à Rawai dans le sud de l'île, initialement mise en vente à 10,5 millions de Baht (228 000 €), vient de s'échanger à 5,9 millions (128 000 €).
Autre exemple, cet hôtel 5 étoiles de 41 villas à vendre pour 380 Millions
de Baht (8 200 000 €) était affiché à 10 millions d'Euros il y a un an.
Où encore le terrain de ce projet de 60 appartements et 6 villas à Bangtao qui était à vendre
sur la base de 11,5 millions de Baht du Rai soit 145 € /m² est
maintenant descendu à 10 millions de Baht du Rai soit 125 € /m².
A Botan Village, une villa de 350 m², dont l'acheteur initial ne peut
payer les échéances, est de nouveau sur le marché à 16 millions de Baht
(330 000 €) au lieu de 25 (516 000 ).
Alors, sommes-nous en crise pour autant?
Car, même s'il y a des affaires à faire en ce moment, le phénomène de
baisse n'est pas encore généralisé. Surtout les baisses indiquées ici
correspondent à une baisse des prétentions des vendeurs, pas à une perte
par rapport au prix d'achat.
Je vais d'abord énumérer les arguments négatifs, qui entraineraient une baisse des prix durables, puis les éléments positifs, ceux qui plaident plutôt vers une stabilisation du marché puis tenter de prédire une tendance à court / moyen terme.
Arguments négatifs
Arguments Positifs
Avant de conclure, je voudrais souligner que le marché de
l'immobilier à Phuket est, par essence, lent. Nous évoluons sur un
marché "international" ce qui veut dire qu'une fois qu'un bien est mis
en vente, que l'annonce est publiée sur un médium international; il faut
attendre que la partie intéressée organise un voyage (c'est-à-dire
réserve un billet d'avion, se dégage des ses obligations etc.) pour
venir visiter le bien sur place. Ceci rallonge considérablement la durée
durant laquelle le bien reste sur le marché. Là où celle-ci se compte en
jours à Singapour; à Phuket un bien se vend rarement en moins de 6 mois..
Quand je parle de court terme, je me place donc à l'horizon de l'hiver
2009-2010, voire 2010-2011.
Au niveau national, les analystes de grosses sociétés de promotion
immobilière comme Supalai, Land and Houses ou encore Asian Property
Development prévoient moins de transactions pour 2009, malgré une baisse
de 5 à 10% de la valeur des résidences, baisse due, selon eux, à la
chute des prix des matériaux de construction, et malgré les incitations
fiscales mises en place récemment par le gouvernement.
Cette analyse ne peut être appliquée telle quelle au marché de Phuket en
raison de sa spécificité.
D'une part, les incitations fiscales (l'abattement sur les ventes
passerait de 100 000 à 200 000 ฿) n'auront de répercussion que sur les
ventes inférieures à 3 millions de Bahts (environ 62 000 €). Or le
marché de Phuket se situe plutôt dans le haut de gamme. D'autre part,
c'est plutôt un marché de résidences secondaires qu'un marché de
résidences permanentes; les préoccupations des acheteurs sont donc
différentes.
Cependant,je pense également qu'on verra peu de transactions durant les
18 prochains mois.
Pour la suite, cela dépend de deux paramètres, à savoir la situation économique mondiale et surtout la situation politique locale, mais je pencherais plutôt, vers une stabilisation, voire une reprise du marché..
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