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Dernièrement, je suis tombé sur deux rapports qui mettent en évidence une
nouvelle fois les contrevérités de notre classe politique, qui s'empare d'un
faux problème sans même le décortiquer tout en proposant des solutions toutes
faites au motif de vouloir soigner un électorat.
Le thème qui me fait réagir est la "juste répartition" de la Richesse des
entreprises, ou plus exactement la fameuse règle édictée sous forme de slogan :
"1/3 des bénéfices pour les salariés ; 1/3 pour les actionnaires ; 1/3 pour les
investissements".
Peu après son élection, le Chef de l'Etat demande un rapport à Jean-Philippe
Cotis, le directeur général de l'Insee. Le thème : le Partage de la valeur
ajoutée et le partage des profits (1). Le 23 février 2009, Sarkozy reçoit ce
Rapport. Dès lors, on s'agite à l'Elysée sur la répartition équitable du fruit
du travail.
Le 25 Janvier 2010, Jean-Pierre Pernaud demandait à Nicolas Sarkozy au journal
de TF1 : « la richesse des entreprises, un tiers aux salariés, un tiers aux
investissements, un tiers aux actionnaires, ça en est où ? »
Nicolas Sarkozy répondait alors : « Je reste attaché à cette idée. J'ai demandé
au patronat et aux syndicats de se mettre d'accord sur cet objectif. S'ils
n'avancent pas, je serai contraint de passer par la loi. »
Deux ans plus tard, aucune Loi n'est passée sur ce sujet. A raison, puisque
cette règle n'a absolument AUCUN sens ! Aussi bien sur la répartition de la
valeur ajoutée que celle des bénéfices.
1.La répartition de la Valeur ajoutée
A l'heure actuelle et depuis une vingtaine d'années, le partage de la valeur
ajoutée créée par les entreprises françaises se répartit d'après l'Insee comme
suit :
-67% pour les salariés ;
-33% pour l'excédent brut d'exploitation (dont un quart, soit 8,25% de la valeur
ajoutée va à la rémunération du capital).
Sur le plan de la répartition de la Valeur ajoutée, le salarié est donc
largement gagnant. Et la tendance ne change pas d'un poil.
2. La répartition des bénéfices en France
Dans son Rapport remis en 2009, l'Insee indique que les profits bruts en 2007
ont été consacrés :
-à 64% à l'investissement et aux salariés ;
-et à 36% à la rémunération du capital (actionnaires).
A noter que la part qui revient aux salariés est intégrée dans l'investissement
(cette part compte pour 7% du total des bénéfices). Etant donné que la part qui
revient aux actionnaires est déjà proche des 33% (elle est à 36% exactement), la
seule variable sur laquelle on peut influer serait la part de l'investissement.
En clair, il s'agirait de dire aux entreprises : " investissez moins ! ". On
croit rêver...
3. Na répartition des bénéfices aux US
Si on se réfère à une Note de Goldman Sachs, on observe que la répartition des
profits des entreprises américaines sont très sensiblement similaires à celles
de la France. Si on fait une moyenne sur les 5 dernières années (entre 2007 et
2011) on obtient la répartition suivante :
-61% des bénéfices va à l'investissement et aux salariés ;
-39% des bénéfices va à la rémunération du capital (actionnaires).
Et on parle ici du pays qui est l'essence même du Capitalisme ! Ont-ils eu
besoin de légiférer à ce sujet ? Pensez-vous qu'il y a eu ne serait-ce que
l'once d'un débat à ce sujet aux US ?
Moralité
Aussi bien sur le plan de la Valeur ajoutée que la part des bénéfices,
l'actionnaire n'est pas avantagé outre mesure au point de légiférer sur ce
sujet. Notre Président et ses communicants auraient-il une nouvelle fois manqué
l'occasion de se taire ? Certainement ! Car l'écart entre les rémunérations des
actionnaires et des salariés ne peut être modifié sans modifier l'investissement
des entreprises. Ce qui est impossible !
En fin de compte, se formaliser à cette fameuse règle des trois tiers est
impossible. A moins que, derrière tout ça, on ait voulu éviter un autre débat
plus sensible et qui mériterait pourtant un attention toute particulière :
l'écart de rémunération entre les patrons et les salariés, qui lui s'est
considérablement creusé... Et sur ce point, juste au passage : je suis d'accord
pour légiférer.