On connait tous l'histoire d'Arnaud Lagardère qui s'est endetté à titre
personnel pour racheter ses propres actions en Bourse. Il est en faillite
personnelle virtuelle au vu des actifs inférieurs à son endettement quelques
années plus tard. Comme il fait partie de la haute élite française et qu'il
contrôle vaguement un machin qui produit des armes, les banques lui ont foutu la
paix.
Mais son expérience est intéressante. Le 28 août 2008, Dominique D'Hinnin de
Lagardère déclarait qu'il avait annulé 3% du capital en ayant racheté au plus
haut en 2007 des titres en Bourse.
Cela revient à investir les bénéfices de leur activité sur leurs propres actions
dont les cours pouvaient s'effondrer et se sont effondrés... Quelle est la
pertinence de ces stratégies managériales ? Les élites capitalistes n'ont elles
plus aucune idée de croissance et de développement et préfèrent réduire le
flottant au risque de tout perdre ?
Je pense à ces dizaines de milliers de salariés qui ont travaillé sous pression
pour atteindre un résultat économique qui a été investi dans du vent, un cours
boursier.
La question de la croissance des entreprises m'a toujours fasciné. Je crois que
les plus avisés si on fait abstraction de GE qui est une machine à part dans le
monde économique de la croissance par rachat externe, sont Apple et Google qui
stockent l'argent sans le distribuer ni l'investir en attendant l'occasion
unique.
Ne rien faire vaut souvent mieux que de tenter des projets mal ficelés sous
la pression des marchés financiers et actionnaires qui aboutissent à de la
destruction de valeurs. On encense dans les médias corrompus les deals de rachat
énormes en taille. Ce que personne ne précise, ce sont les statistiques de
création de valeur 5 ans après la réalisation de ces fameux deals. Elles sont
massivement négatives selon le Boston Consulting Group et d'autres spécialistes.
Si on y réfléchit bien, les analystes financiers et autres investisseurs
attendent des taux de croissance de 10 à 15% chaque année, alors que de nombreux
marchés économiques sont bornés par le haut, soit parce que un minimum
d'intervenants se partagent les parts de marché et que se développer contre eux
est trop couteux, soit parce que le nombre de consommateurs pro ou privés sur le
créneau n'est tout simplement pas expansible.
Je constate avec les années que de nombreux chefs d'entreprises cotées en bourse
ou non échouent, ce qui est logique, mais que de l'autre côté de la barrière, la
pression des 10 à 15% par an est toujours là. Il y a des jours, je me dis que la
gestion des multinationales est comme une pièce de théâtre. Pas possible que les
gens se mentent à eux mêmes. Chacun joue son rôle sans y croire dans le fond...
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