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Grèce: La raison... financière devrait l'emporter sur les promesses d'une vie meilleure

Par Laetitia Baldeschi;

Laetitia Baldeschi

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L'arrivée de M. Tsipras à la tête de l'exécutif grec après un mois de campagne fondé sur un discours anti-austérité a ramené le dossier grec sur le devant de la scène européenne. En effet, le parti majoritaire au Parlement, Syriza, a fondé une bonne partie de sa campagne électorale sur la remise en cause des réformes imposées par la Troïka, sur sa légitimité même, et sur le possible effacement de la dette dans un premier temps puis rééchelonnement, cette dette étant jugée insoutenable pour le pays.

Rappelons que la charge de la dette grecque représentait certes 4,2% du PIB en 2014 selon la Commission européenne, mais la gestion de la dette irlandaise pesait 4,1% du PIB, l'italienne 4,7% et la portugaise 5%...

Qu'en est-il réellement de la situation des finances publiques grecques ?

Le déficit public s'est réduit drastiquement depuis la mise place des programmes d'aide. Il est passé de 15,2% du PIB en 2009 à 2,5% en 2014. Selon les prévisions de la Commission européenne, le solde public pourrait être excédentaire dès 2015. Cette réduction du déficit public s'est faite, d'une part, au prix d'une très forte contraction des dépenses publiques mais aussi, d'autre part, d'une progression sensible des recettes de l'Etat. Toutefois, on observe depuis quelques mois déjà des rentrées fiscales bien inférieures aux objectifs fixés par le programme d'aide.

Le mouvement s'est nettement accéléré en ce début d'année, avec des recettes fiscales inférieures de 23,8% aux prévisions. Sur un an, elles reculent de plus de 20%. Un peu de lassitude fiscale chez les Grecs ? Le sentiment que le nouveau gouvernement sera plus à même d'effacer les ardoises fiscales ? ... Ou bien une surévaluation de la capacité à lever l'impôt de l'administration ?

Toujours est-il que cette faiblesse, si elle devait perdurer, remettrait en cause les objectifs d'excédent primaire et public pour l'année 2015.

C'est d'autant plus problématique pour le gouvernement que la situation de trésorerie est actuellement un peu tendue. En effet, la Banque centrale européenne a cessé d'appliquer une clause exceptionnelle lui permettant d'accepter en collatéral les titres grecs malgré une notation inférieure au minimum requis par l'institution. De fait, cela limite la possibilité du gouvernement de se financer via l'émission de bons du Trésor (dont l'encours est limité à 15 milliards d'euros) faute de banques capables de venir les acheter et se refinancer à la BCE. C'est un bon moyen du côté européen de maintenir une certaine pression sur le gouvernement. Les banques grecques ne peuvent plus compter que sur la procédure de la fourniture de liquidité d'urgence (ELA) prévue par la BCE et exercée par la banque centrale de Grèce en sa qualité de prêteur en dernier ressort.

Quels sont les moyens de financement de M. Tsipras ?

Certes, le programme d'aide a été prolongé jusqu'en juin. Toutefois, il ne signifie pas automatiquement le versement de l'aide financière. Celle-ci est conditionnelle à la mise en place des réformes structurelles. Pour le moment, la situation est bloquée. Le gouvernement n'a toujours pas été suffisamment précis dans ses intentions en la matière.

Selon les informations disponibles, une partie du 2ème programme, au titre de 2014, n'a pas été versée à la Grèce. En effet, les revues d'étapes n'ont pas été validées par les institutions (Commission européenne, FMI et BCE), anciennement Troïka, depuis l'été dernier, pour cause de réformes insuffisantes, ce qui a bloqué le versement de 8,8 milliards prévu dans le programme initial, dont 1,9 milliard à verser par l'Europe pour le second semestre 2014. De plus, ce 2ème plan d'aide court toujours jusqu'en mars 2016 pour la partie à la charge du FMI qui doit, pour la seule année 2015, verser 7,2 milliards.

A ceci il convient d'ajouter le versement par la BCE des profits tirés de son portefeuille de titres grecs dans le cadre du SMP, profits évalués à 2 milliards en 2015. Par ailleurs, il existe un fonds grec de stabilité financière, créé dans le cadre du plan de sauvetage et abondé par les institutions afin de couvrir les besoins en capital des banques grecques, dans les caisses duquel il reste 11 milliards non utilisés.

Face à ces sources de financement théoriquement possibles, la Grèce a des engagements, au-delà de la gestion courante du fonctionnement de l'Etat. Elle doit commencer à rembourser au FMI les fonds prêtés dans le cadre du 1er plan d'aide (printemps 2010), et qui n'ont pas été concernés par les réaménagements décidés lors de la négociation du 2ème plan d'aide (rééchelonnement des prêts bilatéraux notamment).

Au total, la Grèce doit rembourser au FMI 6,76 milliards d'euros en 2015, avec des échéances un peu lourdes (1,2 milliard d'euros) en mars, juin, septembre et décembre. Arrivent également à échéance les obligations détenues par la BCE en juillet et août prochains pour un montant de 7,67 milliards d'euros.

Le gouvernement grec ne pourra donc pas échapper à la négociation d'un accord avec les institutions, dans la mesure où il décide que le pays restera dans la zone euro, et exclut donc le défaut sur ses engagements. Le plus difficile sans doute sera de faire passer ce message sur la scène politique nationale, après avoir conduit une campagne électorale riche en promesses...

Laetitia Baldeschi
Stratégiste
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