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Le trading algorithmique, 2ème partie

Par Traders mag;

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Ce texte sur la trading algorithmique est la suite de celui que vous trouverez ici.

La chasse aux algorithmes

Personne sur les marchés ne conteste la légitimité du marché électronique ou de l’arbitrage statistique. Bien plus controversés sont les algorithmes qui chassent d’autres algorithmes.

De nombreux algorithmes, par exemple, peuvent détecter la signature électronique d’un système VWAP, un processus appelé "algo-sniffing". Cela permet de faire gagner rapidement des sommes substantielles à son détenteur : si le VWAP est programmé pour acheter des actions d'une société en particulier, le programme algo-sniffing achètera ces actions plus vite que le VWAP et les lui vendra à profit.

L'algo-sniffing rend souvent furieux les utilisateurs de VWAP ou d'une autre exécution d’algorithmes. Ces derniers la condamnent, l’estimant déloyale. Il y a de plus en plus de demandes pour ajouter des caractéristiques anti-jeu à l'exécution des algorithmes afin de les rendre plus difficiles à détecter et à les exploiter.

Cependant, un courtier de New York avec qui nous avons parlé en octobre dernier avait défendu l’algo-sniffing : "Je ne vois pas cela comme quelque chose de mal... Je ne pense pas que la personne qui essaie de se cacher derrière le déséquilibre de la demande et de l’offre [en utilisant une exécution d’algorithme] soit mieux qu'une autre personne essayant de découvrir les vraies offres et demandes. Je ne sais pas pourquoi quelqu'un qui fonctionne sur la stratégie algo sniffing serait mauvais. Il essaie de découvrir la personne qui a un million d’actions [à vendre] et le prix devrait du coup se réajuster du fait qu’il y a un million d'actions à acheter."

Spoofing

Quelque soit le point de vue que l’on prenne sur l’éthique, l’algo-sniffing est incontestablement légal. On peut être plus dubitatif concernant une série de stratégies qui cherchent délibérément à duper d'autres algorithmes. Un exemple en est le « layering » ou le « spoofing ».

Un spoofer peut, par exemple, acheter un bloc d'actions et afficher un grand nombre d'ordres d'achat pour les mêmes actions à des fractions au-dessous du prix actuel du marché. Les autres algorithmes, ainsi que les traders humains, verraient alors des ordres d’achat plus importants et plus nombreux sur ces actions que les ordres de vente, et concluraient vraisemblablement que leur prix est à la hausse. Ils pourraient alors acheter les actions eux-mêmes, provoquant la hausse des cours. Quand ils le feraient, le spoofer annulerait ses ordres d’achat et vendrait les actions qu’il détenait à profit. Il est vraiment difficile de déterminer depuis combien de temps ces manipulations durent. En octobre 2008, par exemple, la Bourse de Londres a imposé une pénalité de 35 000 $ à une entreprise pour spoofing.

À quelle vitesse s'exécute le trading à haute fréquence ?

Beaucoup, mais pas toutes, les stratégies automatisées de trading nécessitent un trading de haute fréquence ultra-rapide. Le market making électronique en est le plus clair exemple. La différence entre le prix auquel un programme de market maker achète les actions et le prix auquel il les vend est souvent aussi petite qu’un cent.

Les algorithmes des markets maker ont donc besoin d’échanger les prix qu'ils proposent très rapidement. Un algo-sniffer ou un arbitragiste statistique peut avoir un peu plus de temps : on nous a dit, par exemple, que les programmes d’arbitrage statistique peuvent tenir une position pendant toute une journée (et dans de nombreux cas, même plus longtemps) avant de la liquider. Cependant, même dans ces cas, une opportunité peut s’évanouir très rapidement si un autre algorithme la repère en premier.
 
Les vitesses augmentent tout le temps. Dans les données de Hasbrouck et de Saar, qui proviennent de 2007 et 2008, l’unité principale du temps de trading était encore la milliseconde, mais cela commence à sembler presque obsolète : le temps est maintenant souvent mesuré en microsecondes (des millionièmes de seconde). La Bourse de Londres, par exemple, révèle que sa plateforme de trading Turquoise peut désormais exécuter un ordre à une vitesse d'environ 124 microsecondes.
 
De nombreux intervenants du marché parlent déjà en termes de nanosecondes (des milliardièmes de seconde), mais cela est davantage du marketing qu'une réalité technologique.

Les questions de géographie

Parce que l’échelle de temps du trading a changé, la signification de l’espace a elle aussi été altérée. Il y a quelques années, il était commun de proclamer la « fin de la géographie » dans les marchés financiers et il est certainement vrai que si l'on pense en terme d'heure en heure ou même de minute en minute les mouvements du marché, cela ne pose pas de problème que le trader soit basé à Londres, New York, Tokyo, Singapour ou  Sao Paulo. Cependant, cela n’est pas le cas dans le trading à haute fréquence.
 
Imaginez, par exemple, que votre bureau soit à Chicago, le second centre financier le plus grand des États-Unis et que vous voulez passer un ordre à la Bourse de New York. Vous êtes à environ 1200 kilomètres des machines exécutant les ordres de Mahwah, et en envoyant un message en utilisant la route la plus rapide avec de la fibre optique entre Chicago et New Jersey, cela prend environ 16 millisecondes. C'est un retard énorme : vous pouvez aussi bien être sur la lune.
 
Les améliorations techniques dans les amplificateurs nécessitaient d'accroître la force du signal et la transmission par la fibre optique réduira quelque peu le retard, comme si cela redresserait la route (les câbles de fibre optique tendent encore à suivre les lignes de chemin de fer parce qu’il est plus facile de négocier des droits de passage ici, mais les chemins de fer ne fonctionnent pas sur des lignes droites pour les longues distances, ils vont dans des centres ville).
 
En dernier lieu, nous savons que la vitesse de la lumière est une barrière insurmontable. Si Einstein a raison, aucun message n'est jamais arrivé à être obtenu de Chicago à Mahwah en moins de quatre millisecondes.

Aussi près que possible

La solution, c’est ce qu’on appelle la "colocation" : en plaçant les systèmes d’ordinateur sur lesquels vos algorithmes fonctionnent près des machines exécutant les ordres directement dans les centres de données comme Mahwah. La "colocation" n’est pas bon marché - un simple rack sur lequel vous placez votre serveur vous coûte 10 000 $ par mois, et il est devenu un gros poste de gain pour les bourses et les autres lieux de rendez-vous électroniques du trading - mais il est complètement essentiel au trading à haute fréquence.
 
Même le positionnement de vos ordinateurs dans les centres de données est un sujet très sensible : vous entendez des histoires (peut-être hallucinantes) de traders se rendant directement dans les centres de données et essayant de forer des trous dans des murs pour raccourcir le chemin depuis leur serveur jusqu’aux machines exécutant les ordres. La Bourse de New York a fait de nombreux efforts pour s'assurer qu'aucun endroit dans l'équipement de Mahwah ne soit meilleur qu’un autre en terme de vitesse d'accès aux machines exécutant les ordres.

Un bond en avant

Les histoires d’ordinateurs hors de contrôle sont un thème de fiction rebattu, il est important de souligner qu'il n'est pas prouvé que le trading automatisé soit plus dangereux que le trading humain qu’il remplace. Si le danger s’était accru, cela se serait manifesté par une plus forte volatilité des prix des actions exécutées avec des algorithmes. La preuve de ce danger n’a pas été apportée – la comparaison entre les deux est évidemment difficile, et la littérature académique sur le trading automatisé est encore petite – mais les données que nous avons est que le trading automatisé réduit la volatilité. Par exemple, les algorithmes d'arbitrage statistique qui achètent quand les prix tombent et qui vendent quand ils montent doivent normalement atténuer la volatilité.
 
Le gros de la recherche suggère aussi que le trading automatisé rend le prix d’achat et de vente d’actions moins cher et plus facile. Louer l'espace d'un rack dans un centre de données peut être cher mais pas aussi cher qu'employer des dizaines de traders humains bien payés.
 
Il y a 20 ans le "spread" (la différence) entre le prix auquel un market maker humain achètait et vendait une action était quelquefois de 25 cents ; la vérité est que désormais ce spread est descendu à un cent ce qui signifie des économies substantielles pour les fonds communs de placement, les fonds de retraite et les autres grandes institutions, dépassant largement les pertes dues aux algo-sniffers. Si l’on regarde des critères comme le coût du trading, on pourrait dire que les effets d’automatisation sont bénéfiques pratiquement tout le temps.


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