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La pénurie des denrées agricoles est-elle une réalité ?

Par Vincent Benard

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Avec la hausse des prix alimentaires actuelle nous est resservie à tout bout de champ la sempiternelle mauvaise soupe à la fois fin-du-mondiste et anti-libérale. Les coupables ? "La spéculation sur les marchés et le changement climatique sont à l'origine de pénuries catastrophiques", nous dit-on*. Ces affirmations résistent-elles à un simple examen superficiel ?

Pénuries ?

Il est malheureusement trop tôt pour disposer des statistiques de production mondiale de nourriture 2010, mais voici, à partir du site de la FAO, l'évolution 2002-2009* de quelques denrées de base en millions de tonnes, comparées à la population mondiale.

Denrée prod 2002 2007 2008 2009 2002/2009, %
Lait de vache 510 569 579 580 +13
Riz (paddy) 569 657 686 679 +19
viande de porc 93 100,5 104 106 +14
viande bovine 57 61,9 61,8 61,7 +8
blé 574 613 683 682 +19
oeufs de poule 53 59,5 61 62 +17
soja 181 220 231 222 +22
maïs 604 789 826 817 +35
sucre canne 1334 1617 1736 1682 +26
Population mondiale 6234 Mns 6606 6681 6755 Mns +8%

*2009 : dernière année disponible. 2002 : choisie au hasard - Une autre référence n'aurait pas changé les conclusions.

Que constate-t-on :

1) Que l'année 2009 a été globalement moins prolifique que l'année 2008, année record pour nombre de productions, mais que les niveaux de production en 2009 ont été pour la plupart malgré tout nettement supérieurs à ceux de 2007. A noter que les estimations préliminaires pour le blé font apparaitre encore une légère baisse, 677 millions de tonnes, pour l'année 2010 par rapport à 2009 (682 Mt), ce qui reste incomparablement supérieur à 2007.

Cette baisse de 2009 est à peu près générale sur tous les grands postes de production, mais de telles "sautes d'humeur" de l'agriculture mondiale ne sont pas rares. En étudiant les séries FAO sur de plus longues périodes, on trouve, par exemple, que la transition de 1999 à 2000 s'est traduite également par une baisse de la production mondiale des principales céréales, Maïs, Riz, Blé. Bref, tirer des conclusions alarmistes de la seule baisse des principales productions entre 2008 et 2009 serait pour le moins hâtif.

Production par production, la tendance est haussière mais avec une certaine volatilité annuelle, nous rappelant que les rendements agricoles sont affaire de météo. Mais si une tendance se dégage, elle est évidemment nettement positive.

2) Dans toutes les productions de base, l'augmentation de production a été supérieure, voire nettement supérieure, à l'accroissement de population mondiale. Dans le cas des viandes bovines, elle a juste été égale.

3) Chaque année, il y a eu une ou plusieurs régions du monde qui ont connu des événements météo perturbateurs au plan mondial, entre sécheresses et inondations. Visiblement, cela n'a pas empêché la production agricole mondiale de progresser régulièrement et sûrement. Parler d'une plus grande dépendance de l'agriculture à des aléas climatiques extrêmes, comme on l'entend souvent, semble pour le moins prématuré et tendancieux.

Même si 2009 n'a pas été aussi faste que 2008, les discours catastrophistes n'ont pas lieu d'être si l'on observe l'évolution des productions agricoles dans une perspective de plus long terme.

Sachant que ni la composition géopolitique du monde ni le climat "moyen", si tant est que cette dernière notion veuille dire quoi que ce soit, n'ont beaucoup varié depuis 2002, nous pouvons raisonnablement déduire que ces deux éléments n'ont pas freiné l'évolution haussière de la production agricole : accuser les méchants marchés de matière première ou le méchant CO2** (on ne rit pas !) de provoquer des pénuries est une imbécillité sans nom.

La production mondiale par tête tend à augmenter inexorablement, ce qui prouve que le progrès technique d'une part, et l'enrichissement relatif du monde d'autre part, tendent à améliorer la productivité agricole. Et on ne voit pas pourquoi ce mouvement s'arrêterait, quoiqu'en disent les catastrophistes de toutes obédiences.

Vincent BENARD

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