L'Union européenne sort les griffes. En réponse directe aux hausses de tarifs douaniers imposés par Donald Trump sur l'acier et l'aluminium européens, Bruxelles prévoit de taxer une série de produits emblématiques venus des États-Unis. Ce mercredi 9 avril, les 27 États membres doivent se prononcer sur un projet de droits de douane à hauteur de 25 %, visant des importations américaines soigneusement choisies pour leur impact politique autant qu’économique. Une mesure qui ne s'appliquerait pas immédiatement : l'UE joue la montre, en activant ces sanctions à partir du 15 mai, voire du 1er décembre pour certaines catégories si aucun accord n’est trouvé.
Le symbole est fort. Si l’objectif officiel reste la désescalade par la négociation, la sélection des produits visés ne doit rien au hasard. Motos, maquillage, jus d’orange, tabac, cartes à jouer, soja ou encore diamants : l’éventail est large, mais pas anodin. L’UE entend frapper là où ça fait mal politiquement, tout en ménageant certaines sensibilités… comme celle de la France, très attachée à la préservation de ses exportations de vins et spiritueux.
Quels produits américains seront ciblés par ces nouveaux droits de douane ?
La liste, révélée par Reuters et Bloomberg, ressemble à un catalogue de l’Amérique exportatrice. Ce ne sont pas les produits les plus massifs en volume, mais ceux qui comptent symboliquement ou qui sont ancrés dans des régions stratégiques pour les élections américaines.
Voici quelques exemples de produits qui pourraient être soumis à un droit de douane de 25 % :
- Diamants
- Motos
- Bateaux de plaisance
- Électroménager
- Produits cosmétiques
- Bois et verre de sécurité
- Cartes à jouer
- Tabac
- Volaille
- Produits agricoles : soja, riz, maïs doux, amandes, jus d’orange
Certains produits pourraient n'être taxés qu’à 10 %. Le choix du taux répond à un subtil dosage entre impact économique, message politique, et potentielle capacité de négociation avec Washington.
Pourquoi le bourbon du Kentucky a-t-il été épargné ?
C’est l’un des rares produits à avoir été retiré de la liste, et ce n’est pas un oubli. Le bourbon, symbole de l’Amérique profonde, avait déjà été dans le viseur de l’UE lors de précédents épisodes commerciaux. Cette fois-ci, Paris a pesé de tout son poids pour le faire sortir de la liste, redoutant un retour de bâton sur les vins et spiritueux européens. La menace n’est pas théorique : Donald Trump a évoqué des droits de douane de 200 % sur ces produits en cas de représailles européennes trop agressives.
Ce retrait illustre la complexité de la stratégie européenne, prise entre la nécessité d'afficher sa fermeté et celle d’éviter une guerre commerciale à grande échelle.
Jusqu’où l’UE est-elle prête à aller contre les États-Unis ?
L’option de la confrontation frontale reste, pour l’instant, un levier de pression. Le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, a souligné que le volume total des produits visés serait en réalité inférieur aux 26 milliards d’euros initialement envisagés. En parallèle, Bruxelles tente d’ouvrir la voie à un apaisement : elle propose une exemption totale et réciproque des droits de douane sur les produits industriels, y compris les voitures. Mais cette offre a été refusée par Donald Trump, qui persiste dans sa ligne dure.
Les ministres européens du Commerce, réunis lundi à Luxembourg, ont néanmoins entamé les préparatifs d’éventuelles contre-mesures à une taxe réciproque de 20 % promise par Washington la semaine dernière. Bruxelles pourrait présenter sa position définitive dès la semaine prochaine, selon Olof Gill, porte-parole de la Commission.
La partie d’échecs continue donc à coups de menaces, de dates butoirs et d’exclusions ciblées. Et si la guerre commerciale n’est pas encore relancée officiellement, elle n’a sans doute jamais été aussi proche.
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