« La France n’est plus le leader mondial du tourisme ». L’alerte est claire, directe, et provient d’un acteur clé du secteur : Dominique Marcel, président de l’Alliance France Tourisme. Ce jeudi, à l’occasion d’un colloque organisé avec Régions de France, il a dénoncé un recul préoccupant de l’Hexagone sur la scène touristique mondiale. En 2024, la France a généré 71 milliards d’euros de recettes touristiques, un chiffre qui la place seulement au 4e rang mondial, loin derrière l’Espagne et ses 126 milliards d’euros, malgré un nombre de visiteurs inférieur.
Ce déclassement ne se joue pas sur le volume de touristes, la France a franchi cette année le cap symbolique des 100 millions de visiteurs étrangers, mais sur la valeur générée par chaque séjour. Et c’est bien là que le bât blesse. « Ce qui compte, ce n’est pas seulement le nombre de touristes, mais leur niveau de dépense », insiste Dominique Marcel. Une stratégie qui mise uniquement sur les flux, sans améliorer l’expérience, pourrait à terme pénaliser l’ensemble du secteur.
Pourquoi la France perd du terrain face à l’Espagne
Le contraste est saisissant. Alors que la France caracole en tête du nombre d’arrivées internationales, elle voit sa place reculer dès qu’il s’agit de recettes économiques. La faute à un tourisme trop court, trop transitif : de nombreux voyageurs ne font qu’une étape d’une nuit avant de repartir vers une autre destination européenne. À l’inverse, l’Espagne attire des séjours plus longs, mieux valorisés, avec des offres haut de gamme mieux calibrées.
Autre point souligné par l’Alliance France Tourisme : le manque d’investissements dans l’hébergement. Le parc hôtelier français souffre d’un déficit de modernisation, peu en phase avec les attentes des voyageurs d’aujourd’hui. À cela s’ajoute une sous-valorisation du tourisme intérieur, alors même que deux tiers des dépenses touristiques proviennent des Français eux-mêmes.
« Il ne faut pas se focaliser uniquement sur la clientèle internationale », alerte Dominique Marcel. Pour lui, la stratégie gagnante doit aussi s’appuyer sur une meilleure qualité d’accueil, une réponse adaptée aux habitants locaux et une revalorisation des territoires hors des grandes métropoles.
Des investissements à long terme pour espérer rebondir
Le constat est dur, mais pas sans solutions. L’Alliance France Tourisme plaide pour un changement d’approche en profondeur : passer d’un objectif de quantité à une logique de qualité, avec des investissements massifs dans l’hébergement, les infrastructures et la formation.
Dominique Marcel le rappelle : « Il faut dix ans pour investir ». Ce qui implique d’agir sans attendre. L’accueil des Jeux Olympiques de Paris 2024 représente une opportunité à ne pas gâcher. Encore faut-il en tirer un effet structurant durable, et non se contenter de l’effet vitrine.
Voici les pistes évoquées par le président de l’Alliance France Tourisme :
- Travailler davantage avec les Régions, pour coordonner les politiques touristiques locales
- Rénover en profondeur le parc hôtelier français
- Allonger la durée moyenne de séjour grâce à une meilleure expérience
- Mieux répartir les flux pour éviter le surtourisme
- Investir dans la valeur plutôt que dans le volume
« Il ne faut pas s’autocongratuler », conclut Dominique Marcel, « les autres progressent très vite, et on perd des points ». Le message est clair : le sursaut est possible, mais il demande vision, cohérence et moyens. À défaut, la France risque de rester spectatrice de sa propre chute, dans un secteur qui représente pourtant une manne économique majeure.
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