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Le gouvernement propose de rétrécir Fret SNCF, menacé par une enquête de Bruxelles


Actualité publiée le 23/05/23 21:05
Le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune, à la sortie du conseil des ministres à l'Elysée, le 15 mars 2023 à Paris
Le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune, à la sortie du conseil des ministres à l'Elysée, le 15 mars 2023 à Paris (AFP/Archives/Ludovic MARIN)

Le ministre délégué aux Transports Clément Beaune a exposé mardi le scénario qu'il négocie avec la Commission européenne pour éviter une faillite de Fret SNCF, menacée par une enquête de Bruxelles qui soupçonne cette filiale du groupe ferroviaire public d'avoir bénéficié d'aides illégales.

La Commission s'intéresse au soutien dont a bénéficié Fret SNCF sur la période 2007-2019, et en particulier à l'annulation de sa dette de 5,3 milliards d'euros. Celle-ci a été intégrée à la dette de la holding du groupe SNCF lorsque celui-ci a été refondé début 2020 en application de la dernière réforme ferroviaire.

La Commission pourrait déclarer ces aides illégales car non conformes aux règles de l'UE en matière d'aides d'Etat, ce qui provoquerait automatiquement la faillite de Fret SNCF, incapable de rembourser.

Le gouvernement a donc préféré composer, et négocie un compromis.

M. Beaune a proposé à Bruxelles un "scénario de discontinuité", selon le ministère. Il s'agit concrètement de liquider Fret SNCF, et de créer une nouvelle société qui ne porterait pas sa dette.

Mais cette nouvelle entité doit être moins importante que celle qu'elle remplace.

En l'espèce, le gouvernement propose de céder à des concurrents les "trains dédiés". Ces trains de marchandises réguliers, affrétés par des clients uniques, représentent 30% du trafic et 20% du chiffre d'affaires de Fret SNCF (750 millions d'euros environ).

"Il n'y aura aucun licenciement, évidemment", a garanti M. Beaune. Les cheminots concernés seraient repris par la SNCF, ou transférés à d'autres opérateurs s'ils sont volontaires.

La nouvelle société garderait la "gestion capacitaire", c'est-à-dire les trains que compose Fret SNCF avec les wagons de ses différents clients, qui ne formeraient pas des convois rentables s'ils étaient pris isolément.

Des trains de fret SNCF, en gare de Sotteville-lès-Rouen, en Normandie, le 2 juin 2008
Des trains de fret SNCF, en gare de Sotteville-lès-Rouen, en Normandie, le 2 juin 2008 (AFP/Archives/ROBERT FRANCOIS)

Cette activité représente 80% du chiffre d'affaires de la société pour 70% de son trafic, et occupe 90% de ses 5.000 cheminots. Elle est rentable grâce aux aides d'Etat au fret ferroviaire --qui viennent d'être prolongées jusqu'en 2030 et légèrement augmentées-- et aux efforts de productivité, importants depuis plusieurs années.

Très longtemps déficitaire, Fret SNCF a été enfin bénéficiaire en 2021 et 2022.

- "Scénario du moindre mal" -

L'entreprise contrôlant actuellement environ 50% du marché du fret ferroviaire en France, la nouvelle société, dont une partie du capital pourrait être cédée à un tiers --la SNCF restant majoritaire--, en contrôlerait 35% à sa naissance début 2025.

Evoquant devant des journalistes "un épisode qui est difficile pour le fret ferroviaire", Clément Beaune a dit croire "profondément" que son plan sera accepté par Bruxelles.

"C'est un scénario du moindre mal, mais c'est un scénario qui fait mal", a commenté un cadre de la SNCF.

Dans un cas comparable, la compagnie aérienne Alitalia avait été soumise à un régime plus sévère en devenant ITA Airways, mais le successeur de Fret SNCF ne tiendrait pas plus de cinq ou six ans dans ces conditions, selon la même source.

Bruxelles serait sensible à l'importance du fret ferroviaire dans la lutte contre le réchauffement climatique, ce qui expliquerait que la punition envisagée ne soit pas trop sévère. Le gouvernement français envisage d'ailleurs toujours de doubler la part modale du rail, face à la route et à la voie d'eau, à horizon 2030.

Les syndicats représentatifs des cheminots SNCF craignent une "liquidation" de la branche fret.

Une centaine de dirigeants et militants de la CGT-Cheminots, de l'UNSA Ferroviaire, de SUD-Rail et de la CFDT-Cheminots s'étaient rassemblés à proximité du ministère de la Transition écologique à Paris, avant une réunion pendant laquelle Clément Beaune devait présenter son plan.

Le numéro deux de la CGT-Cheminots, Thierry Nier, a dénoncé la cession "d'une part des trafics, notamment les plus rentables", à la concurrence privée.

Selon les syndicats, un affaiblissement de Fret SNCF risque en outre de se traduire par un report modal vers la route et donc davantage d'émissions de gaz à effet de serre, à rebours du nouveau plan présenté lundi par le gouvernement.

"Interpellons-les face au paradoxe qu'ils créent", a lancé Thomas Cavel, secrétaire général de la CFDT-Cheminots, en souhaitant mobiliser les organisations de défense de l'environnement, au-delà des salariés du secteur ferroviaire.

© 2023 AFP

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