Le couperet est tombé : dès le 1er mars 2025, tous les auto-entrepreneurs devront appliquer la TVA dès 25 000 euros de chiffre d’affaires. Une décision qui fait grincer des dents et pose une question cruciale : faut-il changer de statut pour éviter la TVA ou conserver le régime micro-entreprise malgré ce bouleversement ?
Un abaissement drastique du seuil de TVA pour les auto-entrepreneurs
Jusqu’ici, les auto-entrepreneurs bénéficiaient de seuils différenciés pour l’exonération de TVA :
- 85 000 euros pour les activités commerciales et artisanales,
- 37 500 euros pour les prestations de services et professions libérales.
Mais dès mars 2025, ce seuil est ramené à 25 000 euros pour tout le monde, un changement de taille qui impose de facturer la TVA bien plus tôt que prévu. Concrètement, près de 250 000 auto-entrepreneurs vont devoir appliquer et reverser la TVA à l’État, une contrainte supplémentaire qui réduit mécaniquement leur rentabilité, sauf s'ils augmentent leurs tarifs.
« Beaucoup risquent de voir leur rentabilité s’effriter… ou d’être contraints d’augmenter leurs tarifs », prévient Jean-Baptiste Achard, fondateur de StaffMe, une plateforme de mise en relation pour freelances.
Changer de statut pour éviter la TVA : une fausse bonne idée ?
Face à cette réforme, certains envisagent de quitter la micro-entreprise pour une SARL, SASU ou entreprise individuelle classique. Mais ce choix pourrait être un piège, prévient Stéphane Absolu, expert en fiscalité chez Pyxis Conseil :
« Changer de statut uniquement pour éviter la TVA peut être un mauvais calcul. Certes, la gestion comptable devient plus complexe avec la TVA, mais les avantages du régime micro-entrepreneur restent très attractifs », explique-t-il.
Parmi ces atouts :
Une comptabilité simplifiée : pas de bilan détaillé, juste un suivi des recettes et dépenses.
Un abattement fiscal avantageux :
- 71 % pour les activités commerciales,
- 50 % pour les prestations de services BIC,
- 34 % pour les professions libérales.
Des cotisations sociales proportionnelles au chiffre d’affaires : si aucun revenu n’est généré, aucune charge n’est à payer (contrairement aux autres statuts).
L’ACRE : une exonération partielle des charges sociales pendant un an pour les créateurs d’entreprise.
Autrement dit, le passage en société ou en entreprise individuelle classique entraîne une gestion comptable plus lourde, des obligations accrues et des charges fixes, même en cas de mois creux. Un choix à mûrement réfléchir.
Dans quels cas changer de statut devient intéressant ?
Si la micro-entreprise reste le statut le plus simple et avantageux pour la majorité, certains profils peuvent tirer parti d’un changement :
Les indépendants qui investissent lourdement dans leur activité : si vous achetez régulièrement du matériel coûteux (informatique, outils, équipements…), passer au régime réel permet de récupérer la TVA et d’amortir les dépenses.
Les entrepreneurs en forte croissance : si votre chiffre d’affaires dépasse largement 25 000 euros et que vous frôlez les plafonds de la micro-entreprise (77 700 euros pour les services, 188 700 euros pour le commerce), opter pour une SARL ou une SASU peut être plus rentable sur le long terme.
Ceux qui collaborent avec des entreprises : si vos clients sont principalement des entreprises, facturer la TVA ne sera pas un inconvénient, car elles pourront la récupérer.
« Finalement, c’est un arbitrage au cas par cas, en fonction du chiffre d’affaires et des dépenses de chaque entrepreneur », conclut Stéphane Absolu.
Une réforme qui suscite la colère des auto-entrepreneurs
Au-delà des implications pratiques, cette réforme provoque une levée de boucliers. Les oppositions politiques se sont emparées du sujet, dénonçant une "hausse déguisée des impôts" pour les indépendants.
« On a failli rater cet énorme scandale ! » s’est insurgé Éric Coquerel (LFI) sur les réseaux sociaux.
« Stop au racket des indépendants ! » a dénoncé le Rassemblement National, lançant même une pétition contre cette mesure.
Avec près de 3 millions d’auto-entrepreneurs en France, cette réforme impacte un électorat clé, notamment les artisans, commerçants et freelances.
De son côté, le gouvernement défend cette mesure comme un geste en faveur de l’égalité fiscale. Selon Amélie de Montchalin, ministre chargée des Comptes publics, ce nouveau seuil permet de réduire les distorsions de concurrence. Mais selon Grégoire Leclercq, président de la Fédération nationale des auto-entrepreneurs (FNAE), cette mesure pourrait pousser les indépendants à augmenter leurs prix de 20 %.
Avec 400 millions d’euros de recettes fiscales supplémentaires attendues, difficile d’imaginer que le gouvernement fera marche arrière.
Ce qu'il faut retenir :
✔ Dès mars 2025, le seuil d’exonération de TVA passe à 25 000 euros pour tous les auto-entrepreneurs.
✔ Facturer la TVA devient obligatoire au-delà de ce seuil, ce qui réduit la rentabilité ou impose une hausse des prix.
✔ Changer de statut n’est pas forcément la meilleure option, car les avantages du régime micro-entrepreneur restent nombreux.
✔ Ceux qui investissent beaucoup ou dépassent les plafonds du régime micro-entrepreneur peuvent envisager un changement.
✔ La réforme est vivement critiquée, et les oppositions politiques tentent de s’en emparer.
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