(ABC Bourse) - Le gouvernement portugais promet une année 2026 en terrain positif : excédent budgétaire, retraites revalorisées, baisse de la pression fiscale. Une trajectoire rare en Europe, qui suscite autant l’admiration que l’interrogation.
Une croissance qui tient, une dette qui recule, et des promesses fiscales à la clé : en octobre 2025, le gouvernement portugais a présenté son projet de budget pour 2026, affichant un optimisme presque déroutant. Le pays prévoit un excédent budgétaire de 0,1 % du PIB en 2026, après 0,3 % en 2025 et 0,5 % en 2024. Lisbonne promet en parallèle une hausse des retraites et une baisse des impôts. Une annonce qui contraste avec les efforts d’austérité dans d’autres capitales européennes.
À Lisbonne, l’exécutif de centre droit dirigé par Luis Montenegro, reconduit en mai, entend poursuivre cette dynamique. L’économie portugaise devrait croître de 2,3 % en 2026, après 2,1 % l’an dernier. Le chômage est attendu autour de 6 %. Et le pays emprunte désormais à 3,09 % sur 10 ans, soit moins que la France, qui reste à 3,5 %. Un scénario budgétaire et financier qui attire l’attention.
D’une cure d’austérité au "miracle économique"
Pour comprendre ce revirement, il faut remonter à la décennie 2010. Alors que le déficit public atteignait 9,1 % du PIB, le pays a subi une sévère cure d’austérité, sous l’œil du FMI et de la BCE. Privatisations, hausses d’impôts, réduction du nombre de fonctionnaires : l’État portugais a mené un redressement rigoureux. Puis à partir de 2015, la gauche a instauré des taxes sur les produits de luxe et l’immobilier des plus fortunés.
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Le reste s’est joué sur l’attractivité. L’institut Rexecode évoque une stratégie "privilégiant à la fois la croissance et le redressement des comptes publics". Tourisme florissant, incitations fiscales, afflux d’investissements étrangers… La Direction du Trésor parle même de "miracle économique portugais" pour la période 2017–2019.
En 2025, le salaire minimum reste l’un des plus bas d’Europe de l’Ouest, à 1 015 euros, attirant des entreprises à la recherche de coûts modérés. La France y est très présente : 17 milliards d’euros d’investissements en 2022, 750 filiales, 60 000 salariés.
Une réussite qui cache de profondes fractures
Mais ce redressement spectaculaire a son revers. L’explosion des prix de l’immobilier pèse lourd sur les jeunes et les classes moyennes. Depuis 2015, les prix ont bondi de 124 %, avec une hausse de 16 % rien qu’au premier trimestre 2025. Ce sont surtout les 10 % des ménages les plus riches qui en profitent, concentrant à eux seuls la moitié des actifs immobiliers.
Résultat : un tiers des Portugais de 15 à 39 ans vivent à l’étranger. Cette émigration massive alimente le débat public et inquiète les acteurs économiques.
Sur le plan politique, l’équation reste fragile. Le gouvernement ne détient pas de majorité absolue. Le parti Chega, désormais deuxième force au Parlement, complique les équilibres. Pour faire adopter son budget, l’exécutif devra négocier au cas par cas, dans une Assemblée qu’il ne pourra dissoudre avant mars.
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