abcbourse.com

Le début de la fin... Première suite du feuilleton dix mois après


Par Charles Dereeper

Depuis dix mois, tout s’est déroulé à peu près en accord avec mon scénario de base. Le seul point qui m’a pris à revers a été le retournement à la hausse du dollar. Je n’avais jamais vu de course au cash et je n’ai pas compris ni mesuré en temps réel les enjeux liés au "deleveraging" des opérateurs. A vrai dire, je n’y ai pas cru... jusqu’à l’effondrement. J’ai vraiment été en retard là dessus en particulier sur la chute des matières premières. De même que je suspectais (j’en parlais souvent) l’importance du carry trade sur yen, je n’ai finalement pas anticipé correctement le poids énorme qu’il pesait sur l’ensemble de la finance. Le carry trade a démarré avec la politique des taux zéro du Japon au début des années 90 ! Il est normal que tout bouge en même temps au niveau des risques...

Nous avions d’ailleurs remarqué avec Samuel Rondot que chaque forte baisse du CAC 40 depuis trois ans avait d’abord débuté sur le dollar yen, mais il est difficile d’accepter l’existence du château de cartes des dettes à l’échelle du monde quand nous sommes de simples soldats... et que la folie des rois dépasse de très loin l’imagination la plus fertile...

Ci-dessous un intéressant graphique sur le leveraging et le De leveraging en cours sur les banques, dans le cadre d’une perspective historique depuis 1970, date de Brettenwoods... et de l’abandon de l’étalon or !

En théorie, la crise financière a du carburant pour durer jusqu’en 2012 au moins, le temps que l’excès d’effet de levier se résorbe jusqu’à la moyenne historique...

Alors que faire aujourd’hui que tout le monde disserte chirurgicalement du pourquoi du comment ?

Sur un plan économique, je constate une décontraction de la part des personnes qui m’entourent hors finance : toutes sont persuadées que les problèmes ne vont durer qu’un semestre ou maximum deux et après, la machine repartira... voire que la toute puissance et le dynamisme du peuple américain est capable de miracles.

Mon scénario personnel est inverse : 2009 va commencer par surprendre les français un brin optimistes malgré leur pessimisme au présent. Et 2010 va enfoncer le clou en étant pire que 2009. A mon sens, 2008 est une année charnière dans l’histoire de l’occident sur un plan économique à cause de la démographie et des dettes. Ce duo va provoquer entre 5 à 10 ans de stagnation.

Certes au début, nous avons toujours de bonnes probabilités d’assister à la mise en place de la déflation (doublée d’une forte récession), même si cette dernière n’est toujours pas là au niveau des prix à la consommation et à la production qui sont encore en territoire positif (quoique les dernières publications américaines des prix de gros battent des records à la baisse !).

Mais derrière, je ne parviens pas à acheter l’idée que les économies vont repartir comme avant depuis la seconde guerre mondiale. Elles risquent au contraire de stagner comme l’Allemagne et le Japon, à partir de 1990. A terme, la déflation de la demande intérieure de l’Occident sera en partie compensée par la forte hausse de la demande en provenance de la Chine et de l’Inde. Un milliard d’êtres humains déjà industrialisés et vieillissant contre 2 milliards de jeunes en cours d’industrialisation ! Mais combien d’années vont s’écouler avant qu’ils aient la force de nous tirer à leur tour ?

J’ai actuellement beaucoup de difficultés à avoir une conviction forte sur l’avenir long terme (entre 5 et 10 ans). Autant, il m’a été facile de déceler que Loic Abadie allait avoir raison et ce, malgré les moqueries de l’ensemble de mon entourage qui n’y croyait pas. Autant, maintenant que nous sommes bien dans une crise du crédit qui se propage à l’économie, je n’y vois pas grand chose à horizon 5 ans, à part que nous avons la confirmation de la propagation depuis le mois d’octobre 2008 et que les deux ans à venir vont être « salés » !

A priori, je ne parviens pas à partager l’idée que le monde va s’écrouler : il va régresser ou larver pendant de longues années, le tout accompagné d’un risque très élevé à terme (donc d’ici entre deux et sept ou huit ans) d’hyper inflation dès lors que des tensions sur les matières premières vont débuter à cause des économies émergentes. Autre facteur qui milite pour un retour à terme de l’inflation, au niveau monétaire, les USA viennent de mettre en un an sur la table 2000 milliards de dollars. Ils vont recommencer jusqu’à ce que... C’est certain, ils vont tuer les monnaies, dollar en tête.

Outre l’économie, sur un plan social, la situation va se révéler dévastatrice au-delà de tout ce que peuvent imaginer les Français. Nous sommes en effet en plein délire. Les élites mondiales ne font rien pour arrêter le développement de l’espèce humaine sur terre. Il paraît même que c’est cool... La vérité, c’est que le niveau de compétition entre chaque être humain sur terre augmente proportionnellement au nombre de protagonistes pour la survie matérielle.

Concrètement, il y a déflation effective de la valeur du travail que chacun peut constater (les bras valent de moins en moins cher, car il y en a de plus en plus à l’offre sur les marchés internationaux). Les salariés perdent donc du pouvoir d’achat en permanence, malgré la propagande officielle des états qui préfèrent bidouiller plutôt que d’affronter cette monstrueuse vérité qu’on va devoir se battre entre nous de plus en plus fort pour partager le gâteau.

Y compris au niveau du Co2 et du méthane. La terre est elle vraiment faite pour supporter autant d’humains sur terre ? Pour l’instant, les bilans comptables laissent penser l’inverse.

L’autre vérité ultra dérangeante qui nous attend est que 20 ou 25% de la population française sera à la retraite en 2020. Si on rajoute les enfants, les étudiants, les chômeurs, la fonction publique carnivore autant qu’inefficace et les inactifs divers, la France ne parviendra pas avec son modèle économique actuel à gérer au niveau des finances la chose. La différence en effet entre un chômeur et un retraité, ce sont les coûts de santé... moins d’actifs et une explosion des dépenses, un duo assez corrosif à gérer !

Alors que faire de son épargne dans cet univers plus instable que par le passé ?

Pour les peureux, il faut rester en monétaire au moins jusqu’à la mi 2009, le temps qu’on y voit plus clair. C’est toujours l’option que j’ai choisie pour la majorité de mes capitaux.


Pour les audacieux, seule la gestion alternative de type trading directionnel (soit en systématique, soit en discrétionnaire à condition que le bonhomme soit vraiment solide...) offre une porte de sortie pour augmenter les rendements.

Au niveau des hedge funds directionnels, j’ai un peu plus de mal pour l’instant à y rentrer, car les investisseurs peuvent s’y faire coincer et ne pas pouvoir récupérer leurs billes, ce qui me dérange. Je privilégie la gestion sous mandat qui peut s’arrêter de manière quasi instantanée ! Seule certitude, la forte volatilité demeure une denrée rare que certains traders peuvent exploiter de manière exceptionnelle en ce moment.

Je suis terriblement déçu en revanche par le fait que le gouvernement ait attaqué la loi sur les locations meublées. C’était le seul et dernier moyen de gagner correctement sa vie en travaillant dans l’immobilier. Cette classe d’actifs ne présente plus aucun intérêt désormais pour environ trois ans, du moins, pour ceux qui ont envie de gagner de l’argent. Les prix sont forcés de s’ajuster à la baisse. Je suis complètement stupéfait des croyances actuelles sur l’immobilier, du comportement suicidaire des notaires et agents immobiliers et de l’inconscience des vendeurs. 2009 va remettre les pendules à l’heure et ce sera salutaire !

A long terme, je maintiens que les matières premières, pétrole et métaux vont garantir des rendements largement supérieurs aux actions. Qui plus est, ce sera une protection très efficace en cas d’hyper inflation. De plus, le « corner » lié au fait qu’on ne peut pas industrialiser deux milliards de personnes comme le premier milliard, car les ressources sont limitées (ce que la théorie économique ne prend pas en compte... en particulier celle qu’on injecte dans les « cerveaux » qui nous gouvernent !) protège des marchés baissiers durables dans ce créneau. Au risque de me répéter, il faut poser la question de savoir si la terre est capable de supporter 6 milliards d’individus humains, dont 3 milliards évoluant dans un monde industrialisé ? A titre personnel, je ne le pense absolument pas. Mais je serais probablement mort de vieillesse avant de voir le résultat…

Il existe des certificats qui permettent de placer tous les mois son argent sur les matières premières, comme une simple action. Attention, je n’achète pas pour le moment, tant qu’on n’aura pas vu le nez d’une vraie récession. Autant dire un à deux ans mini. Mais je surveille toutes les semaines la situation avec intérêt. Par exemple, le pétrole vaut 41 dollars. Il ne vaudra jamais 0 dollar. A combien la population mondiale estime qu’il est bon de le consommer ? 30 dollars ? 40 dollars ? Il est pratiquement certain qu’on verra 200 dollars à horizon 10 ans. Il n’est en revanche pas certain du tout qu’on retrouve un niveau de 10 dollars. En résumé, d’un côté, on peut gagner 150 dollars tandis que de l’autre, on peut perdre à tout casser 30 dollars. C’est très intéressant non ?

Enfin, sur le marché du crédit et des valeurs bancaires, je n’y mettrai pas un doigt malgré des baisses de 80%. En effet, pour l’instant, seul le compartiment de la dette des particuliers dans le domaine de l’immobilier a « sauté ». Il en existe un autre nettement plus dense, la dette des entreprises... Je suis très pessimiste pour 2009 car de nombreuses entreprises vont faire faillite. Combien vivent sur leurs réserves de trésorerie qui s’épuisent petit à petit ? Le système financier ne tient presque plus debout et n’est absolument pas en mesure d’encaisser une nouvelle vague de défauts de paiements. Dans un papier qui est paru sur yahoo.fr en avril 2008, j’avais écrit que le système bancaire US exploserait en septembre. Cela a été le cas. Tout le monde niait la situation quelques mois plus tôt. Il en est exactement de même pour la dette des entreprises : si les USA ne reprennent pas rapidement le contrôle de la situation en faisant redémarrer la consommation par la magie du saint esprit ou ce qu’ils veulent, dans les trois à six mois qui viennent, il est totalement certain que les faillites d’entreprises vont exploser et avec, la finance mondiale qui sera probablement nationalisée de manière plus marquée qu’elle ne l’est aujourd’hui. Allez gagner de l’argent avec l’action d’une banque quand l’état actionnaire prélève un dividende sanction de 10% par an... Peut être ai-je tort, mais je ne suis pas du tout attiré par ce genre de pari pour mon argent personnel !

Pour finir, concernant les indices boursiers type CAC 40, on me demande souvent de jouer à madame soleil. Alors jouons : je vote pour un passage autour des 2300 points au cours de l’année 2009 dans une belle vague 5 si chère aux élliottistes...

Vous avez aimé cet article ? Partagez-le avec vos amis en cliquant sur les boutons ci-dessous :

Les derniers articles publiés par ABC Bourse

Investir en utilisant le temps qui passe et les maths
Comment profiter quand une action fait un nouveau plus haut à 52 semaines ?
Dans quelle banque stocker et sécuriser son épargne ?
La stratégie des Dogs of the Dow a massivement sous performé depuis 25 ans
Développer son réalisme et sa maturité à propos de l'investissement boursier
Gagnez beaucoup plus grâce aux indices boursiers non pondérés
2022, une année boursière avec un rendement supérieur aux moyennes historiques ?
Stagnation - le mot qui va devenir la norme en économie
La perte de confiance dans l'avenir financier
Etes vous pour ou contre la baisse de l'immobilier en 2013 ?