La problématique doit être assez courante puisque j'ai reçu un certain nombre
d'entrepreneurs qui avaient cette double perspective et tentaient de faire les 2
à la fois.
D'emblée, je leur avoue que je ne comprends pas très bien et que la démarche
relève, pour moi, d'une certaine incohérence.
Soit on croit à son modèle et on pense qu'on a la capacité à le pousser plus
loin, et dans ce cas en effet il faut lever pour accélérer, soit on ne le pense
pas et alors il vaut mieux vendre au plus offrant, en supposant que des
acheteurs intéressés existent.
Par contre, je vois quand même dans cette démarche un mérite,
c'est
qu'elle pousse à se poser les vraies questions, qui sont de 2 ordres :
-
Sur la qualité intrinsèque du modèle, autrement dit sa
capacité à délivrer de la valeur de façon pérenne, en ayant construit des
avantages concurrentiels solides. Que ce soit par des brevets et une avance
technologique, des produits innovants, des exclusivités, une vraie marque avec
une clientèle régulière, des capacités d'achat supérieures, des capacités de
production low cost, que sais-je encore,
il faut avoir ces avantages
concurrentiels. Sans avantage concurrentiel, il n'y a pas de bon
modèle, that's all about it.
-
Sur sa capacité d'exécution, on peut avoir un bon modèle
intrinsèquement mais ne pas être forcément le mieux placé pour l'exécuter, on
est trop jeune, on ne pourra pas avoir les ressources humaines ou financières,
on a plus envie et on est lassé, etc.
Lever des capitaux si on a pas un modèle de qualité et/ou si on a pas vraiment
la capacité d'exécution, cela ne peut pas créer beaucoup de valeur économique.
Si par contre on a un modèle de qualité moyenne mais que
celui-ci
prendra toute sa valeur dans un autre contexte, ie adossé à un groupe
plus puissant qui apportera quelques facteurs clés de succès, là il y a
effectivement intérêt à vendre, modulo la question du timing pour optimiser la
sortie.
Par ailleurs, 3 bons conseils : il faut toujours rester
ouvert, flexible
et optimiste. Je veux dire par là que même si un modèle est mauvais ou
médiocre, on peut
quasiment toujours partir des quelques bonnes bases et
acquis existants pour le réinventer, le repositionner et en faire un modèle
correct voire brillant (ce qui demande cependant de savoir opérer une analyse
très juste).
C'est d'ailleurs très rare d'avoir un bon modèle du 1er coup.
Il faut donc toujours rester lucide, pragmatique, réaliste, ne pas s'entêter
quand de façon évidente le "marché" ne va pas du tout dans le même sens que
vous, ni ne frémit dans le même sens que vous ! Peu importe de se planter une ou
plusieurs fois si in fine on arrive à dégager de la valeur qui paye les pots
cassés initialement.
Et pour arriver in fine à dégager de la valeur, une seule règle, ne pas aller au
tapis ! Comme dans un ring, tant qu'on peut se relever, il y a de l'espoir.
Quand on lance un modèle nouveau, et c'est souvent le cas des modèles Internet,
on se lance un peu dans l'inconnu,
il est donc normal de se planter.
Mais ce qui l'est beaucoup moins, c'est de ne pas être lucide et de s'entêter à
ne pas écouter le marché !
En bref, se vendre ou lever des capitaux pour accélérer ne peut pas être une
démarche parallèle, mais doit essentiellement être l'
aboutissement d'une
vraie réflexion de fond.