On y voit plus clair dans la politique monétaire de la FED
Par Loïc Abadie
Depuis environ 2 mois, la FED est visiblement en train d'adopter une
politique monétaire déjà expérimentée au Japon de 2001 à 2005 dans le cadre de
la lutte contre la déflation, appelée "quantitative easing". C'est un
terme dont on va sans doute entendre parler de plus en plus dans les mois qui
viennent.
Cette politique (une nouvelle invention totalement inutile issue des théories
keynésiennes) consiste à fournir au système bancaire beaucoup plus de liquidités
que ce dont il a besoin via une augmentation massive du bilan de la banque
centrale, dans l'espoir que les banques se mettront à prêter plus et relanceront
ainsi l'économie.
Les banques US sont déjà "noyées sous les liquidités" et "parquent" une partie
de ces réserves en excès chez la FED :
Plus simplement, il s'agit d'une nième tentative de fuite en avant dans le
crédit pour tenter de relancer un modèle économique totalement périmé.
Voici le bilan de la FED depuis le début 2008 :
Nous voyons très bien la politique de gonflement très important du bilan de
la FED depuis 2 mois (celui ci est passé de 900 à 2200 milliards de $).
Si on se reporte à l'expérience japonaise, il y a encore de la marge, vu que la
banque centrale du Japon avait à l'époque "grossi" son bilan jusqu'à 30% du PIB.
Pour la FED cela correspondrait à un bilan d'environ 4500 milliards de $.
Qu'est ce que le "quantitative easing" japonais a produit comme résultats ?
Pas grand chose si l'on en croit un article...de la réserve fédérale, à une
époque (en 2006) où elle n'imaginait pas se lancer un jour dans ce type de
politique.la FED d'alors disait donc : "While there is little evidence that
quantitative easing stimulated overall lending activity, there does appear to be
some evidence that quantitative easing disproportionately supported the weakest
Japanese banks."
En clair : le quantitative easing n'a pas été efficace en matière de relance du
crédit, et a surtout servi à soutenir les banques les plus mauvaises (donc à
retarder les réformes structurelles indispensables). Avec 2 ans de recul
supplémentaires, nous constatons que le Japon est en train de replonger dans la
récession et que la menace de déflation y est plus présente que jamais.
Que pouvons nous retirer de cette évolution nouvelle dans la politique
monétaire de la FED ?
1) Nous avons confirmation (pour ceux qui en doutaient) que la FED est bien en
train de tenter (à mon avis sans aucun espoir de réussite) de lutter, comme le
Japon l'a fait, contre la déflation naissante via la politique de quantitative
easing, et reconnaît donc plus que jamais la réalité de cette menace.
2) L'expérience japonaise de 2001-2005 a montré que l'inflation et la croissance
n'avaient pas été relancées de façon significative par cette politique. Ce qui
est logique : en l'absence d'emprunteur intéressé, le crédit ne repart pas même
si les liquidités sont abondantes. La petite reprise de l'économie japonaise
après 2003 doit bien plus à la conjoncture mondiale qu'à la politique monétaire
(le Japon étant de nouveau en récession depuis 2008).
La croissance ne se décrète pas par du "pilotage monétaire" ou de la
"stimulation de consommateurs"...Pour cela il faut travailler et produire, c'est
tout.
3) La FED reconnaît implicitement que sa politique de taux 0 a échoué
puisqu'elle en est réduite à essayer autre chose.
La dernière bulle de cette crise, la bulle de l'intervention étatiste sur le
crédit et des utopies keynésiennes, implosera à son tour comme les autres
bulles, d'une façon ou d'une autre.