Thales en forte croissance au T1 2025, mais les commandes dans la défense s'effondrent

Le géant technologique français Thales a dévoilé un début d’année contrasté : un chiffre d’affaires en forte hausse, mais un recul marqué des prises de commandes dans la défense. Ce paradoxe, révélé ce jeudi 24 avril, jette un voile d’incertitude sur l’avenir commercial du groupe malgré des résultats financiers supérieurs aux attentes.

Entre janvier et mars 2025, Thales a généré 4,96 milliards d’euros de chiffre d’affaires, soit une croissance de +12,2 % en données publiées et +9,9 % en organique. Une performance saluée par les analystes, qui tablaient sur 4,8 milliards. Ce rebond concerne autant l’aérospatial (+13,5 %) que la défense (+16,5 %). Mais derrière ces chiffres flatteurs, une zone d’ombre inquiète : les prises de commandes dans la défense plongent de 58 %, à seulement 1,3 milliard d’euros. 

Une activité commerciale contrastée selon les secteurs

Le recul des commandes n’est pas généralisé, mais touche en plein cœur l’un des piliers historiques de Thales : le secteur défense. Cette dégringolade s’explique en partie par une base de comparaison trompeuse. Le premier trimestre 2024 avait été gonflé par deux méga-contrats de plus de 500 millions d’euros chacun notamment la troisième tranche du contrat Rafale avec l’Indonésie et un système de surveillance aérienne pour un client du Moyen-Orient.

En revanche, les commandes dans l’aérospatial bondissent de 45 %, atteignant 1,53 milliard d’euros. Cinq commandes dépassant 100 millions d’euros ont été signées ce trimestre, dont un contrat avec Space Norway pour le satellite THOR 8 et un autre avec l’ESA pour le projet lunaire Argonaut.

Dans le secteur Cyber & Digital, la situation est plus terne, avec des revenus en baisse de -1,5 %. La fusion avec Imperva, censée doper l’offre cyber, connaît un démarrage heurté, notamment sur les services en Australie.

Le groupe rappelle que ses prises de commandes sont historiquement plus concentrées sur le second semestre. Pour l’instant, l’entreprise conserve tous ses objectifs 2025, notamment un ratio book-to-bill supérieur à 1, contre 0,48 au T1.

Ce ratio, crucial pour évaluer la dynamique commerciale, est aujourd’hui sous pression. Mais Thales reste confiant : "Une commande supérieure à 100 millions d’euros a été enregistrée au premier trimestre, contre quatre un an plus tôt", précise le communiqué officiel. Et le PDG Patrice Caine insiste : "Nous confirmons tous nos objectifs financiers annuels pour 2025".

• Objectif de chiffre d’affaires annuel : entre 21,7 et 21,9 milliards d’euros
• Croissance organique attendue : entre +5 % et +6 %
• Marge d’EBIT ajustée : entre 12,2 % et 12,4 %

Même les incertitudes liées à la guerre commerciale déclenchée par les États-Unis n’ébranlent pas les prévisions. Thales étudie déjà des plans de contournement douaniers, via l’ajustement de sa chaîne d’approvisionnement et des programmes d’exonération comme le “duty drawback”.

Ce que les marchés vont surveiller de près dans les mois à venir

Si la croissance des revenus reste robuste, la vraie bataille de Thales se jouera sur le terrain des signatures commerciales dans la défense. Avec un carnet de commandes historiquement bas pour un premier trimestre depuis 2022, le groupe n’a pas le droit à l’erreur au second semestre.

Les prochaines semaines seront cruciales pour rassurer les marchés, surtout après une envolée boursière spectaculaire de +80 % depuis janvier. Un trou d’air sur les commandes, s’il devait se prolonger, pourrait vite faire dérailler la trajectoire boursière et stratégique d’un des fleurons de la tech européenne.