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Les ordinateurs viennent de frapper à nouveau sur les indices boursiers

Par Samuel Rondot

samuel rondot

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Mais ca serait pas un petit flash krach sur les indices européens ?

Toutes les conditions étaient réunies :

un marché traditionnellement ultra calme entre Noël et nouvel an qui est souvent caractérisé par le plus faible volume de l'année.

Des fêtes qui tombent un samedi et qui ont poussé nombre d'opérateurs à prendre cette semaine de vacances.

Les marchés toujours fermés à Londres au lendemain de Noël (premier jour ouvré)

De la neige en pagaille sur New York qui ne devrait pas motiver beaucoup de traders à faire un effort

Et là, 9h06 et 39 secondes le CAC comme tous ces homologues européens digère tranquillement le foie gras et le Chapon à 3860 points sur le future.

9H06 et 40 secondes, on cote 3740 !

120 points de baisse en 1 seconde.

Plus de 3 % volatilisés en quelques millisecondes.



Plus de 2% sur l'Eurostoxx, presque 2% sur le Dax, aucune bourse en Europe n'a échappé au scénario.

Chaque fois qu'un mouvement comme celui là arrive, le premier coupable auquel on pense c'est ce qu'on appelle un gros doigt.

Pour passer un ordre, les traders ont un premier clavier avec les unités et un autre avec les multiples.

Par exemple, pour un ordre de 200, il appuient sur 2 puis sur le multiple 100. C'est censé réduire le risque d'erreur en tapant trop vite le nombre de zéro.

Mais il est arrivé régulièrement qu'un opérateur tape trop vite, ou qu'un ballon lancé par un camarade tombe au mauvais moment au mauvais endroit (véridique) et le mauvais multiple, envoie un ordre que le marché ne parvient pas à digérer, genre une vente de 1 million de titres au lieu de 1000 par exemple.

Sauf que dans ces cas là, les autres marchés suivent un peu le mouvement par empathie mais jamais dans de mêmes proportions.

Sauf qu'hier le mouvement a été global, sur tous les indices européens ce qui trahit l'agissement de trading automatique haute fréquence et pas l'erreur humaine d'un opérateur.

Je ne suis pas sur qu'on saura un jour quel est l'opérateur qui est derrière ca.

Je rappelle les 3 hypothèses dans un flash krach :

Soit un programme de HFT a eu un problème et il s'est pris tous seul les pieds dans le tapis

Soit il a leurré d'autres programmes qui ont vendu à tout prix

Soit plus surement un peu des deux à la fois.

La première chose de sur c'est que de part et d'autre ce sont des ordinateurs qui ont initié le mouvement et probablement des ordinateurs qui aussi ont profité d'achat sur des niveaux éloignés.

Quoiqu'il en soit, une vente est une vente. Dans le meilleur des cas, ils ont vendu des contrats qu'ils avaient acheté il y a quelques jours à un meilleur prix donc il n'y a pas trop de casse financière, dans le pire des cas (pour eux) c'est de la vente à découvert et la ca fait un peu plus mal car ils doivent se racheter depuis.

Logiquement vous allez me dire, bien fait pour lui (ou pour eux) si ca lui a couté de l'argent, espérons que ca soit suffisant pour le faire disparaître (peu probable vu les faibles volumes concernés), ou que au moins ça le force à corriger son algorithme et que ca n'arrive pas à nouveau.

Je ne peux qu'être d'accord et si je suis farouchement contre une régulation de plus, je reste convaincu qu'il faut faire face à ce vers qui est en train de manger la planète finance de l'intérieur.

Quelque soit votre opinion sur la finance, le fait est qu'on en a un besoin vital dans un monde capitaliste.

Le fondement même de la bourse est de donner un moyen de financement aux entreprises.

Sans cette source de capitaux, la crise que nous venons de vivre (ou que nous sommes toujours en train de vivre) vous paraitra comme une période paradisiaque en comparaison de ce qui nous attend si le système capitaliste ne parvient pas à se financer, on a déjà eu un aperçu avec la Grèce et l'Irlande.

En bourse comme ailleurs il y a des règles.

Sauf qu'en bourse plus qu'ailleurs, les moyens pour surveiller la bonne application de ces règles sont tellement dérisoires par rapport à ceux qui sont censés les utiliser que dans la situation actuelle ca ne pourra jamais être le cas.

Prenons un exemple :

Vous prenez une tête bien faite à la fin de ses études ou avec de l'expérience et vous lui proposez 2 offres d'emplois :
- Une pour travailler au contrôle des opérations : un fixe, pas ou peu de bonus et une réputation...
- Une pour travailler au front office : gérer des millions qui ne sont pas à vous avec un solide fixe pour vous faire accepter le stress et si ca marche bonus et tutti quanti.

Vous croyez qu'elle va choisir quoi notre tête bien faite ?

Petite parenthèse, rappelez vous que le chef des produits structurés a déjà du mal à comprendre ce que lui racontent ses ingénieurs, que les chefs de Kerviel n'ont rien vu (soit disant mais probablement aussi) pendant des mois, et vous voulez que ceux au contrôle qui n'ont probablement jamais passé un ordre de leur vie, fassent appliquer les règles ….

Une fois encore nos politiques se trompent de combat.

Pour l'instant leur réponse au HFT c'est de créer de nouvelles règles.

Mais si la finance est malade, ce n'est pas parce qu'il manque des règles, mais plus simplement parce qu'elles ne sont pas appliquées comme il faut.

Depuis longtemps je suis convaincu que ce n'est pas une taxe sur les profits ou les opérations qu'il faut imposer mais plus simplement un partage à part égal entre unité de production des profits, unité de contrôle et organisme externe de contrôle.

Comment croyez vous que les anglo-saxons dans les années 90 ont abaissé de plus de 50% le taux de mortalité lié à l'alcoolisme : en faisant passer les fautifs pour des meurtriers aux yeux de leurs proches à grands coups de campagnes de pub et de contrôles.

Et vous savez très bien comment la France a divisé par 2 le nombre de morts sur les routes à cause de la vitesse.

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