À douze jours d’un vote de confiance crucial, Amélie de Montchalin avance une mesure choc : supprimer 50 niches fiscales jugées inefficaces. Une promesse d’économies, mais aussi un pari risqué dans un contexte budgétaire explosif.
Amélie de Montchalin, ministre des Comptes publics
Le chiffre claque comme un coup de rabot : 50. C’est le nombre de niches fiscales que la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, propose de supprimer dans le prochain budget. Une annonce faite mercredi 27 août sur BFMTV, alors que le gouvernement cherche à gratter 44 milliards d’euros d’économies pour boucler le projet de loi de finances 2026.
"C’est une proposition qu’on va faire aux parlementaires, de supprimer 50 niches fiscales évaluées comme obsolètes ou inefficaces", a-t-elle affirmé, sans en dévoiler la liste. Objectif : rationaliser un système devenu tentaculaire. En France, 474 niches fiscales existent encore, dont 65 sont déjà en extinction. Leur coût pour les finances publiques est colossal : 85,1 milliards d’euros par an.
Ce que cache la chasse aux niches fiscales
Si la suppression de certains dispositifs semble justifiée, comme ceux qui ne bénéficient qu’à quelques dizaines de contribuables, d'autres soulèvent des inquiétudes. La ministre a toutefois assuré qu’elle ne toucherait pas aux mesures jugées efficaces. "J’ai toujours dit en ce qui concerne les gardes d’enfant, les personnes âgées à domicile, les personnes handicapées, je ne souhaite pas que nous touchions à ce qui fonctionne", a-t-elle rappelé.
Les suppressions viseraient donc principalement des dispositifs peu utilisés ou aux effets économiques jugés marginaux. Parmi les 69 niches fiscales identifiées comme profitant à moins de 100 contribuables, certaines sont particulièrement anecdotiques. C’est le cas de la déduction exceptionnelle pour les simulateurs d’apprentissage à la conduite (26 entreprises), ou de l’exonération de CVAE pour les commerces en zone rurale (12 bénéficiaires). Plus surprenant encore : 36 niches n’ont eu aucun bénéficiaire en 2022, comme l’exonération de droits de mutation pour les dons d’œuvres d’art ou la TVA réduite pour l’équitation, créée en 2024.
Mais ces dispositifs, même s’ils peuvent paraître absurdes, ne représentent qu’une infime partie de l’enjeu budgétaire. La Cour des comptes notait en 2023 que 149 niches n’avaient quasiment aucun impact sur les finances publiques. À l’inverse, 15 mesures concentrent à elles seules plus de 50 % du coût global. Le crédit d’impôt recherche (7,7 milliards d’euros) et celui pour l’emploi à domicile (6,8 milliards) sont les plus massifs.
Vers une réforme sous tension politique
La proposition intervient dans un contexte politique ultra-sensible. Le gouvernement est en sursis à moins de deux semaines d’un vote de confiance décisif pour François Bayrou, et tente de construire des compromis budgétaires avec l’opposition.
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Amélie de Montchalin défend une approche fondée sur le dialogue. "L’équité fiscale c’est que chacun contribue à la hauteur de ses moyens", martèle-t-elle, en écho aux propos de François Bayrou, qui cible ouvertement les avantages fiscaux des plus aisés. "Les niches fiscales qui profitent d’abord aux ménages aisés et aux grandes entreprises seront supprimées à chaque fois qu’elles seront constatées comme injustes et inutiles", a-t-il déclaré.
Dans cette logique, certaines pistes font déjà l’objet d’un consensus : taxation des petits colis, renforcement de la lutte contre la fraude, ou encore accords ponctuels avec des partis d’opposition.
Mais entre volonté de simplification et réalité politique, le rabot fiscal risque de rencontrer quelques résistances.
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