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Dans un contexte économique dégradé, les analystes sont toujours en train
d'affiner l'analyse conjoncturelle des Etats-Unis et de la Zone euro. Les deux
thèmes qui cristallisent toutes les attentions sont bien entendu la Dette et la
Récession.
Alors qu'on avait connu une baisse des tensions autour des craintes de récession
entre le 8 et le 15 Août, celles-ci sont reparties à la hausse à partir du 15
Août avec la parution de cinq révisions à la baisse des prévisions sur la
croissance de grandes banques américaines qui ont pesé sur les Marchés.
Voyons ou nous en sommes du côté des prévisionnistes en ce qui concerne la
récession, alors que des chiffres très importants sur le PIB américain vont être
publiés le 26 Août.
Au 9 Août, 85% des analystes (35/41 d'après Reuters) avaient d'ores et déjà
revus à la baisse leurs prévisions pour le PIB américain du 3éme trimestre. La
semaine du 15 au 19 Août aura été l’occasion pour plusieurs banques de dégrader
leurs prévisions de croissance pour 2011 et 2012. Petit tour d’horizon :
Morgan Stanley
Le 17 Août, Morgan Stanley s’inquiétait de la situation économique actuelle dans
une Note de 18 pages intitulée « Global Economics : Dangerously Close to
Recession ». Pour le moment, le Courtier n'établit pas son scénario central en
tablant sur une Récession. Voici ce que MS a justifié dans sa dernière Note :
"Nous sommes dangereusement proche de la récession, mais ce n'est pas notre
scénario de base. Nous n'y croyons pas car :
i) le secteur de l'industrie semble être en bonne santé,
ii) les revenus des ménages seront soutenus par une inflation plus faible,
iii) nous nous attendons à davantage d'action des banques centrales, y compris
des réductions de taux et l'usage d' assouplissement quantitatif (Fed et BCE)".
Voici les prévisions de Morgan Stanley :
On relève au passage que les révisions de croissance de Morgan Stanley sont
drastiquement revues à la baisse dans les pays développés en 2012 (de -30% pour
les pays du G10). Les estimations sont ainsi revues en baisse de 30% aux US et
de 50% au Japon et en Europe.
Curieusement, Morgan Stanley a seulement abaissé de 10% ses prévisions sur les
pays émergents. Je reviendrai sur ce point dans un autre article, puisque je
partage cette analyse.
Goldman Sachs
Le 18 Août, Goldman Sachs a annoncé abaisser ses prévisions de croissance pour
les US et l’Europe en 2011 et 2012. La grande banque US a abaissé ses prévisions
pour les US en 2011 de 1,8% auparavant à 1,7% et de 3,0% à 2,1% en 2012. Pour
l’Europe, GS établit une prévision 2011 de 1,9% contre 2,1% auparavant et de
1,4% contre 1,7% en 2012 :
Abby Joseph Cohen, gourou de Wall Street et principale analyste financière de
Goldman Sachs, indiquait dans une interview à CNBC le 19 Août :
« Soyons très clairs, il y a quelques soucis fondamentaux, mais notre sentiment
est que la valorisation du marché américain est déjà établie à partir d'un
scénario de prix très bas » avant d’ajouter que « les marchés pourraient pricer
une récession, mais un ralentissement sévère de l'économie américaine est un
scénario peu probable ».
Elle précise que « les niveaux actuels sur le S&P 500 laissent envisager de
nombreuses années d'absence de croissance des bénéfices. Pour nous, cela ne
semble pas être le scénario le plus probable » et justifie plusieurs catalyseurs
potentiels pour soutenir le marché, comme « l'amélioration des ventes au détail,
des créations d'emplois et les résultats des entreprises américaines ».
Des révisions à la baisse de Goldman Sachs à attendre ?
A la lecture de cette Note, j’estime qu’il y a encore une marge pour des
révisions à la baisse, principalement dans la composante des Dépenses de
consommation :
Je ne suis pas d'accord avec les prévisions et le point de vue de Goldman Sachs.
Pour moi, les prévisions de GS sont encore trop optimistes, et ne tiennent pas
compte des dernières données statistiques notamment en ce qui concerne la
Consommation des ménages qui comptent pour 70% de la croissance du PIB
américain. Cela mérite qu'on s'y attarde un peu.
En effet, Goldman s'attend à dépenses réelles de consommation au-dessus de zéro,
à 1% pour le T3. D'une part, une croissance de 1% des dépenses de consommation
personnelle n'est pas assez pour sortir du malaise économique. D'autre part, si
l’on regarde les précédentes données, ces chiffres seraient une très bonne
nouvelle.
Les chiffres de la confiance des consommateurs de l’Université du Michigan,
publiés le 12 Août, ont reflété l’idée que beaucoup d'Américains ne voient pas
de reprise. L’indice de confiance a plongé à 54,9 points contre des attentes de
63,0 points. C’est une chute de 13,8 points par rapport aux chiffres de Juillet
de 63,7. Les 2/3 de tous les consommateurs ont même indiqué que l'économie avait
récemment empiré, et seul 1 sur 5 anticipait une amélioration au cours des
années à venir.
Cette inquiétude est appuyée par le sondage Gallup du 18 Août, plus axé sur la
politique, qui est au plus bas depuis 2008 - avec de fortes inquiétudes dans
l’emploi, l’économie et les déficits. Le dysfonctionnement politique à
Washington sur la question du plafond de la dette y est certainement pour
quelque chose.
Selon moi rien ne devrait s’arranger : le moral sera toujours en berne dans les
mois qui viennent ce qui impactera les dépenses de consommation. Le seul point
positif sur ce terrain concerne une pression inflationniste qui devrait baisser
(comme l'a souligné d'ailleurs Morgan Stanley dans sa Note du 17/08).
Aussi, dans la partie Investissements des entreprises, je pense que les
estimations de +2,5% de Goldman Sachs sont encore trop optimistes (voir le
dernier Philly Fed qui est au plus bas depuis Mars 2009 avec des résultats pires
que mauvais). Certains analystes notent tout de même que les Investissements
pourraient être soutenus par des taux d'emprunt accommodants.
JP Morgan, Citigroup, Wells Fargo
Vendredi 19 Août, c’était au tour de Citigroup et de Wells Fargo qui abaissaient
leurs prévisions de croissance du PIB américain pour 2012 à 2.1% contre 2.7%
auparavant pour Citigroup et de 1,1% contre 1,9% pour Wells Fargo. JP Morgan
leur a emboité le pas un peu plus tard dans la journée, passant de 1,5% à 0,5%
au 1er trimestre 2012 et de 2,5% à 1% au Quatrième trimestre 2011 pour les US.
Ces derniers estimaient dans leur rapport, je cite, « que les risques de
récessions étaient clairement élevés ».
Conclusion
Pour résumer, deux éléments peuvent faire pencher la balance économique des pays
avancés :
-une poursuite de la chute boursière : la transmission de la panique des marchés
financiers sur les entreprises et les ménages pourrait avoir des effets très
négatifs. Cela plomberait la consommation, et surtout cela inciterait les
entreprises à reporter, voire annuler, leurs projets d'investissements
-l'austérité : elle pourrait créer en Europe et aux Etats-Unis un cercle vicieux
défavorable à la croissance. Pour réduire leur dette et leur déficit, les Etats
coupent dans leurs dépenses sociales, d'investissement et de soutien à la
croissance. Résultat : les ménages ne consomment plus, l'activité des
entreprises ralentit, ce qui rapporte moins de recettes fiscales. Le déficit se
creuse alors encore plus.
En ce qui concerne les prévisions, on attend de voir les décisions des autres
grandes Banques plus tard cette semaine. Elles ne devraient être guerre plus
réjouissantes. On suivra aussi avec grande attention les chiffres préliminaires
du PIB américain le 26 Août à 14h30.
D'un point de vue Macro : en cas de chiffres inférieurs aux attentes, les
économistes pourraient alors devenir une majorité à envisager une Récession dans
les 6 à 12 mois.
Pour information, le consensus du PIB est à +1,1%.
Du côté des Marché Actions : si de mauvais chiffres sont publiés, le consensus
du Bénéfice Par Action pour 2012 des sociétés du S&P 500 devrait être abaissé.
Au 17/08, le consensus établi par 13 Grandes Banques US pour le BNA est de
103.75, avec une fourchette située entre 102 et 108$ (soit un PER 2012 actuel de
10,82). En attendant, on devrait assister à un marché encore très volatil.