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Sur le Danube, la galère pour sauver les céréales ukrainiennes


Actualité publiée le 17/06/22 12:07
Des bateaux stationnés au large du canal de Sulina, le 8 juin 2022 dans l'est de la Roumanie
Des bateaux stationnés au large du canal de Sulina, le 8 juin 2022 dans l'est de la Roumanie (AFP/Daniel MIHAILESCU)

Dans le port ukrainien d'Izmaïl, sur le Danube, les chauffeurs routiers s'impatientent, leurs camions débordant de céréales. A l'autre extrémité, en Roumanie, là où le fleuve se jette dans la Mer Noire, les navires rongent aussi leur frein.

De mémoire de marin, jamais tant de bateaux, aux pavillons divers, n'ont stationné au large de Sulina, dans l'est de la Roumanie, attendant de rejoindre l'Ukraine pour être chargés de denrées.

L'invasion russe a tout chamboulé: le blocus par Moscou des ports maritimes ukrainiens, à commencer par celui d'Odessa, a paralysé les exportations de ce pays qui figure parmi les plus gros producteurs mondiaux de céréales.

"L'alternative, c'est le Danube", qui trace une frontière naturelle entre l'Ukraine et la Roumanie. "Le gros problème, c'est la capacité des infrastructures sur le fleuve", explique à l'AFP Ioury Dimtchoglo, ancien vice-président du Conseil régional d'Odessa.

Depuis le début de la guerre, "seul 1,5 million de tonnes de céréales ont pu être exportées par ce biais", dit-il, une goutte d'eau comparé aux quelque 20 à 25 millions de tonnes bloquées en Ukraine selon le président Volodymyr Zelensky.

- "Nourrir le monde" -

Tout en amont de la chaîne, l'exploitant agricole Vyatcheslav Zyabkin, qui travaille à 35 kilomètres du port, n'a "toujours rien mis sur les bateaux du Danube. Pas même un kilo".

Le Danube, voie de transit alternative pour les céréales d'Ukraine
Le Danube, voie de transit alternative pour les céréales d'Ukraine (AFP/Sylvie HUSSON)

Car on lui a proposé un prix d'achat bien inférieur aux coûts d'exploitation, dit-il, estimant que la solution danubienne convient surtout aux petits agriculteurs, qui ont de faibles quantités à écouler.

Et pour ceux qui y ont recours, le trajet est semé d'obstacles.

D'abord les embouteillages sur la route: les camions convergent du sud du pays dans l'espoir de pouvoir décharger sur le Danube.

Puis une fois arrivés au port, là aussi il y a foule.

Chargement de blé dans le port ukrainien d'Izmaïl, le 24 mars 2022
Chargement de blé dans le port ukrainien d'Izmaïl, le 24 mars 2022 (AFP/Archives/BULENT KILIC)

Rencontré à Izmaïl, Serguiï Gavrilenko, chauffeur de 45 ans, marcel à rayures bleues, bob kaki et lunettes d'aviateur, piétine. Il fait 32 degrés et il se lave avec un bidon d'eau rangé dans sa cabine.

"Avant la guerre, il fallait une journée, maintenant il faut compter trois jours. On prend sur nous parce que c'est pour le bien du pays et pour nourrir le monde", confie-t-il.

- "Pas de répit" -

Les embarcations qui prennent le relais et acheminent les marchandises vers les clients étrangers en descendant le Danube, avant de rejoindre la Mer Noire, arrivent en effet au compte-gouttes.

Des bateaux stationnés au large du canal de Sulina, le 8 juin 2022 dans l'est de la Roumanie
Des bateaux stationnés au large du canal de Sulina, le 8 juin 2022 dans l'est de la Roumanie (AFP/Daniel MIHAILESCU)

Au large de Sulina, ils sont près d'une centaine à patienter, entre sept et dix jours en moyenne, avant de pouvoir emprunter le canal en direction des ports ukrainiens.

"Notre volume de travail a beaucoup augmenté. Nous sommes à pied d'oeuvre du lever au coucher du soleil", raconte Gabriel Danila-Mihalcea, 28 ans, capitaine d'un bateau qui multiplie les allers-retours entre Sulina et la mer Noire.

La mission de ce bateau pilote est cruciale: transférer à bord de chacun des navires en rade un pilote qui prendra la barre jusqu'au port de destination.

Deux bateaux entrent dans le canal de Sulina, le 8 juin 2022 en Romanie
Deux bateaux entrent dans le canal de Sulina, le 8 juin 2022 en Romanie (AFP/Daniel MIHAILESCU)

Cette règle a été entérinée en 1948 par la Convention du Danube en raison des dangers d'un cours d'eau trompeur.

"Nous n'avons pas de répit", se désole, sous couvert de l'anonymat, l'un des 36 navigateurs affectés à cette tâche.

"Le mois dernier, 400 bateaux sont passés par Sulina, c'était un record", s'exclame le mécanicien du bateau pilote, Mihai Calin, 48 ans dont 30 les pieds dans l’eau.

- "Ouragan de famines" -

"Le trafic a triplé par rapport à mai 2021", confirme auprès de l'AFP le secrétaire d'Etat roumain aux Transports Ion Popa.

Gérer cette hausse est "un effort pour la Roumanie", ajoute-t-il, disant espérer une aide de Bruxelles.

Un bateau pilote roumain accompagne l'entrée d'un navire dans le canal de Sulina, le 8 juin 2022 en Roumanie
Un bateau pilote roumain accompagne l'entrée d'un navire dans le canal de Sulina, le 8 juin 2022 en Roumanie (AFP/Daniel MIHAILESCU)

Après s'être rejeté la responsabilité pour les délais d'attente en rade, la Roumanie et l'Ukraine ont mis en place fin mai un commandement conjoint qui décide de l'ordre dans lequel les navires entrent sur le Danube. Ceux affrétés pour le transport de céréales sont désormais prioritaires.

Près de 700.000 tonnes ont par ailleurs été transportées depuis le début du conflit via le port roumain de Constanta, sur la Mer Noire, à bord de barges, de trains ou de poids lourds, souligne M. Popa.

Mais les files d'attente aux postes-frontières routiers et ferroviaires s'allongent chaque jour.

Avant la guerre, l'Ukraine était le quatrième exportateur de maïs, en passe de devenir le troisième exportateur mondial de blé et assurait seule 50% du commerce mondial de graines et d'huile de tournesol.

Si la crise dure, l'ONU craint "un ouragan de famines" dans les mois à venir.

© 2022 AFP

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2 commentaires sur cet article. Participez à la discussion.

ricky_59
17/06/22 16:46
Quel chantage à la famine dans le monde, des révoltes se préparent sur tous les points du globe...
gars d'ain
18/06/22 09:44

Quel pipeau surjoué... Visiblement, il en reste moitié moins selon l'Association Céréalière d'Ukraine ...


Je note : "Depuis le début de la guerre, "seul 1,5 million de tonnes de céréales ont pu être exportées par ce biais", dit-il, une goutte d'eau comparé aux quelque 20 à 25 millions de tonnes bloquées en Ukraine selon le président Volodymyr Zelensky. "


Les chiffres contradictoires viennent de l'Ukraine et c'est plutôt tendance à croire ce qui est au dessous que les mensonges du président...


Ukraine : la production de blé devrait baisser de 40 %


https://www.lepoint.fr/monde/ukraine-la-production-de-ble-devrait-baisser-de-40--01-06-2022-2477977_24.php


L'Association céréalière d'Ukraine a indiqué qu'elle s'attendait à voir sa production de blé chuter de 40 % entraînant une diminution de 50 % des exportations en raison du conflit avec la Russie. Cette association, qui réunit producteurs et exportateurs des céréales, a indiqué tabler sur une récolte cette saison de 19,2 millions de tonnes de blé, « nettement inférieure au record » de la saison 2021-2022, où elle avait récolté 33 millions de tonnes.


« En dépit de l'occupation de territoires et de champs minés, l'Ukraine sera approvisionnée en céréales et pourra exporter une partie de la récolte », souligne cependant l'association dans un communiqué. Avec 19 millions de tonnes, la production reste trois fois supérieure à la consommation annuelle de blé par l'Ukraine. S'ajoutent à cette production les stocks de la récolte précédente, qui s'élèvent encore à 10 millions de tonnes, selon la même source.

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