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France, état des lieux avant les élections

Par Bernard Marois

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Commençons par rappeler quelques statistiques officielles, qui permettent de dresser un premier bilan de la mandature Sarkozy :

- Entre 2007 et 2012, la dette publique totale(1) de la France est passée de 62% à 89% sans tenir compte des engagements futurs liés au règlement des retraites des fonctionnaires et assimilés. Dans le même temps, l’endettement total (secteur public + entreprises + ménages) a atteint 350%.

Parallèlement, le déficit budgétaire s’est accru de 4,1% à 5,3%. Cela explique que le ratio des dépenses publiques par rapport au PIB soit passé de 52% à 56%, durant le quinquennat (selon les prévisions les dépenses publiques atteindront 56% du PIB en 2012 alors que les recettes publiques plafonneront à 50,8 %).

En ce qui concerne les prélèvements, leur montant a progressé de 42% à 45%. Ce sont essentiellement les impôts sur le capital qui ont connu une hausse substantielle : ainsi la taxation des plus-values immobilières a crû de 27% (2007) à 34,5% (en 2012) ; celle des plus-values mobilières a suivi la même courbe. Quant aux dividendes, la taxation a grimpé de 27% (en 2007) à 36,5 (en 2012).

Si maintenant on se penche sur notre commerce extérieur, on constate que notre déficit commercial s’est fortement aggravé : - 75 milliards d’euros en 2011, soit 40% de détérioration par rapport à 2007.Cet effondrement coïncide avec, d’une part, la baisse du secteur industriel français dans la formation de notre PIB et, d’autre part, la chute de la durée du travail en France, par rapport à l’Allemagne (6% pendant la présidence de Sarkozy) (2) .

Certes, il y a eu la crise financière de 2008-2009, puis la crise grecque de 2010-2011 et le ralentissement de l’économie européenne, mais les efforts effectués par la France ont été notoirement insuffisants, en particulier au niveau de la diminution des dépenses publiques.

Si l’on ajoute les masses salariales de la fonction publique et celles des agents territoriaux, on constate qu’il n’y a eu aucune baisse, contrairement aux promesses maintes fois répétées. Et ce n’est pas les promesses des divers candidats à l’élection présidentielle qui vont améliorer la situation !

Qu’en est-il de la structure sociale de la société française ?

Selon les économistes de gauche, tels que Thomas Piketty, la présidence actuelle aurait accentué les inégalités entre riches et pauvres. Là encore, les chiffres ne corroborent pas du tout ces allégations. En effet, si l’on compare les revenus des 10% les plus pauvres et les 10% les plus riches, le rapport s’établissait à 4,6 en 1970, mais seulement à 3,4 en 1996 et se maintenait à ce niveau en 2009 !


En fait, c’est seulement les « super-riches » (0,01% de la population) qui ont bénéficié des « largesses » de Sarkozy (3).  En ce qui concerne les « patrons » des grandes entreprises, leurs gains sont inférieurs à ceux de leurs homologues britanniques, allemands, italiens ou espagnols ! (cf. l’étude récente de Proxinvest).

Autre point de contestation : la fiscalité mise en place par le gouvernement Fillon privilégierait « les riches ». Faut-il rappeler que 50% des français ne paient pas d’impôt sur le revenu et parmi les moins favorisés, beaucoup bénéficient de transferts financiers divers.

Dans le même temps, on matraque le financement de l’économie à long terme, réalisé par les particuliers. Selon une étude de l’IFRAP, le taux de prélèvement réel sur les actions serait d’environ 60%, si l’on prend en compte les incidences des impôts déjà payés par l’investisseur sur l’argent épargné (I.R. sur les revenus du travail, cotisations sociales, etc.).

Si l’on retient les propositions de François Hollande, on atteint 82% ! Dans ces conditions, on comprend l’attrait de l’immobilier, du livret A ou de l’or sur l’épargnant français, au détriment, bien sur, de l’économie réelle (hors bâtiment).

Dans ces conditions, quelle est la solution ?

Elle est finalement assez simple : relancer la croissance économique, à laquelle un pays comme la France, qui connait une démographie favorable, peut prétendre(4). Pour cela, voila quelques suggestions :

- Stopper la hausse de la fiscalité sur les « investissements à long terme » (actions, prises de participation dans les TPE- très petites entreprises-), en favorisant la conservation de ces titres au-delà de 5 ans, dans le portefeuille des particuliers ;
- Elaborer une véritable politique industrielle, avec des choix de « priorités nationales » ;
- Renforcer la constitution d’universités fortes et administrativement autonomes (5)  ;
- Relancer la recherche et le développement. Le crédit impôt recherche (CIR) doit être amplifié, particulièrement auprès des PME ;
- Continuer la baisse des dépenses publiques globales (en faisant pression sur les collectivités locales « gaspilleuses ») ;
- Etaler la décroissance du déficit budgétaire sur 10 ans, pour éviter d’étouffer la croissance, mais obtenir un engagement institutionnel (référendum, inscription dans la constitution, etc.), de façon à rassurer à la fois nos partenaires européens et les marchés financiers ;
- Mettre en place une véritable « politique urbaine » dans les grandes villes(6).

Réponse à ces questions après le 6 mai (tout au moins nous l’espérons).

Bernard MAROIS
Professeur Emérite à HEC PARIS
Président d’honneur du Club Finance HEC
 
(1) Celle-ci comprend : l’Etat, les collectivités locales et la Sécurité Sociale. A titre d'illustration, on mentionnera la dérive du Régime Général, dont le déficit est passé de 10,2 milliards d’euros en 2008 à 17,4 milliards en 2011.
(2) De ce fait, les coûts unitaires de la main d’œuvre en France sont passés de 117 (en 2007) à 131 (en 2012), pour une base 100 en 2000. Dans le même temps, l’Allemagne voyait croître ses coûts de seulement 7 points (104 en 2007 et 111 en 2012).
(3) Dans ce « mini-club » de très riches, le poids des industriels a diminué, au profit des sportifs de haut niveau, chanteurs, etc., dont beaucoup ne « résident » plus en France ! On pourra consulter, sur ce point, Valeurs Actuelles, 8 mai 2012, p.11.
(4) Cf. un précédent éditorial « démographie et croissance : le cas français ».
(5) Il y actuellement 15 universités à Paris, ce qui est beaucoup trop ! Il faudrait les regrouper en 5 entités au maximum.
(6) Il est scandaleux que rien n’ait été fait à Paris pour rééquilibrer l’offre et la demande de logements. Les jeunes générations font les frais de cette incompétence (ne pouvant se loger à proximité de leur travail).


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