Alors que l’économie de la zone euro traverse une période de turbulences, marquée par un ralentissement industriel en Allemagne et des tensions politiques en France, les marchés boursiers ibériques (Espagne et Portugal) émergent comme une alternative séduisante pour les investisseurs. Entre dynamisme sectoriel, transition énergétique accélérée et résilience économique, la péninsule offre des profils de croissance distincts de ceux des poids lourds traditionnels que sont Paris et Francfort. Les indices IBEX 35 et PSI 20, bien que moins médiatisés, recèlent des actions solides, souvent sous-évaluées par rapport à leurs homologues nord-européennes.
Dans un contexte où le couple franco-allemand peine à impulser une relance concertée – entre crise énergétique persistante et divergences fiscales –, l’Espagne et le Portugal bénéficient d’un repositionnement stratégique. Leur exposition aux énergies renouvelables, leur attractivité touristique et des réformes structurelles (comme la baisse de l’impôt sur les sociétés au Portugal) renforcent leur crédibilité. Pour autant, ces marchés ne sont pas sans risques : dépendance aux approvisionnements extérieurs en gaz, tensions commerciales avec les États-Unis et vulnérabilité climatique rappellent que la prudence reste de mise.
Une croissance résiliente dans un contexte mouvementé
La zone euro affiche des signes d’essoufflement, avec une Allemagne en quasi-récession et une France enlisée dans des défis budgétaires. Contrairement à ces géants économiques, l’Espagne a affiché une croissance de 2,7 % en 2023, tandis que le Portugal a surpris avec une hausse du PIB de 2,3 %. Cette dynamique est liée à une demande interne robuste et un secteur exportateur pro-actif, notamment dans l’automobile et les biens de consommation.
Les désaccords entre Paris et Berlin sur la politique énergétique ou les aides d’État affaiblissent la cohésion européenne, créant un vide que les pays ibériques comblent par des réformes structurelles. L’Espagne, par exemple, a accéléré sa transition énergétique, réduisant sa dépendance aux hydrocarbures russes bien avant ses voisins. Le Portugal, de son côté, mise sur l’hydrogène vert et l’éolien offshore pour capter les investissements étrangers.
Les entreprises phares à suivre, les énergies renouvelables en tête
Parmi les entreprises ibériques cotées, plusieurs noms se distinguent par leur potentiel et leur engagement dans la transition énergétique. Iberdrola, leader mondial de l’éolien, symbolise cette dynamique. Avec un chiffre d’affaires de 54 milliards d’euros en 2023 et un pipeline de projets solaires au Brésil et aux États-Unis, le groupe incarne la réussite de l’internationalisation espagnole. EDP Renováveis, filiale portugaise d’EDP, affiche une croissance annuelle de 12 % dans l’éolien offshore, notamment grâce à des contrats en mer du Nord.
Dans le secteur bancaire, Santander et BBVA restent des piliers, avec une forte exposition à l’Amérique latine, un atout en période de faiblesse de l’euro. Leur ancrage local (40 % des prêts immobiliers espagnols pour Santander) en fait des valeurs refuges en période de volatilité.
Enfin, des valeurs cycliques comme Inditex, maison mère de Zara, bénéficient de la reprise du commerce mondial malgré un contexte inflationniste.
Certaines sociétés citées affichent des ratios prix/bénéfice souvent inférieurs à ceux de leurs concurrents européens, pour offrir aux investisseurs un bon équilibre entre risque et rendement.
Risques géopolitiques et défis structurels
Malgré ces atouts, la région n’est pas à l’abri des tempêtes géopolitiques. La dépendance de l’Europe au gaz russe, bien que moindre en Espagne et au Portugal grâce aux terminaux GNL, reste un point de vulnérabilité. Une nouvelle crise des approvisionnements pourrait peser sur les coûts industriels.
Autre écueil : la position géographique périphérique de la péninsule ibérique. Si elle la protège partiellement des conflits à l’Est, elle la rend aussi sensible aux droits de douane américains, notamment dans les secteurs agroalimentaire et automobile. Les exportations de vin portugais ou de pièces détachées espagnoles pourraient pâtir d’un regain de protectionnisme outre-Atlantique.
Enfin, les défis internes – chômage structurel en Espagne, marché immobilier tendu au Portugal – rappellent que la route vers une croissance durable n’est pas sans embûches.
Conclusion : Un pari judicieux dans un environnement volatil
Les marchés espagnols et portugais offrent des opportunités variées, allant des énergies renouvelables aux services financiers, en passant par la grande distribution. Dans un environnement où la zone euro peine à trouver un second souffle, ces économies font preuve d’une agilité réconfortante.
Cependant, les investisseurs devront garder un œil sur les risques géopolitiques et les déséquilibres régionaux. Une allocation mesurée, privilégiant les secteurs résilients et les entreprises à forte marge de manœuvre, semble la stratégie la plus judicieuse. Dans l’ombre des poids lourds européens, l'Espagne et le Portugal pourraient bien devenir des destinations d'investissement judicieuses au cours des prochaines années.