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Quand Fillon castre le Livret A

Par Rodolphe Vialles

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Le gouvernement vient de prendre une décision surprenante en fin de semaine dernière en annonçant que le taux du livret A serait fixé à 3,5 % au 1er février alors que le mode de calcul prévoyait un taux de 4 %. En ces temps de communication à outrance autour du pouvoir d'achat on ne peut qu'être choqué devant une telle décision qui pénalise l'épargne la plus populaire de France puisque l'on compte 46 millions de livrets A dans notre pays.

Pourtant, depuis une décision de Jean-Pierre Raffarin en 2003, le calcul périodique du taux du livret A est gravé dans le marbre. Il résulte de la moyenne de deux indicateurs: le taux d'inflation hors tabac et l'Euribor 3 mois (taux d'intérêt interbancaire à court terme), moyenne qui est ensuite majorée de 0,25 point. Qu'importe, Bercy,  sous la houlette du premier ministre, a décidé de manière exceptionnelle de passer outre et de fixer le taux à 3,5 % au lieu des 4 % donnés par le calcul.

Bien évidemment, ce tour de passe-passe est accompagné d'une explication, une explication un petit peu boiteuse. La raison principale de cette décision serait liée au financement des HLM. Pour comprendre, il faut revenir à la nature même du livret A qui sert notamment à financer le logement social. Plus les taux d'intérêt du livret sont élevés, plus les prêts accordés par la Caisse des Dépôts aux sociétés HLM le sont également. Le gouvernement met donc en avant le risque de voir sortir de terre moins de logements sociaux si le taux est élevé. Il joue ainsi sur la corde sensible pour essayer de faire passer la pilule, mais je pense que personne n'est dupe.

Avec une inflation qui flirte autour des 3 % on voit bien que le nouveau taux du livret A permet tout juste de préserver l'érosion monétaire du placement favori des Français. "C'est vraiment un bon taux, plus que raisonnable et qui rémunère véritablement à des conditions très, très avantageuses", a indiqué la ministre de l'Economie, Christine Lagarde. On croît rêver quand on entend cela. Un rendement de 0,5% net d'inflation, c'est sûr que ça vaut le coup de laisser son argent à la banque, mieux vaut être sourd que d'entendre des bêtises pareilles.

En toile de fond, on sent bien que le gouvernement ne souhaite pas pousser les Français vers l'épargne mais vers la consommation afin de stimuler l'économie cependant il ne veut pas le dire clairement. La politique du bas de laine est pourtant belle et bien terminée c'est le message que l'on veut nous faire passer. Après une réforme de la fiscalité de la bourse qui a vu s'accroître la pression fiscale sur les plus-values, voilà donc que l'on bride le livret A.

L'autre message détestable tient à la confiance que l'on peut accorder dans la parole de l'État. Alors que les Français doutent de leurs hommes politiques ces derniers s'affranchissent des règles qu'ils ont eux-mêmes fixé il y a quelques années...

Cette décision est assurément une erreur en termes stratégiques comme en termes de communication politique. L'effet psychologique est désastreux puisqu'il touche plusieurs dizaines de millions de personnes qui attendent une revalorisation de leur pouvoir d'achat mais que l'on bride à la moindre occasion. Le gouvernement Fillon n'est décidément pas l'ami des épargnants et des investisseurs.


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